Читать книгу Les jardins : histoire et description - Arthur Mangin - Страница 4
ОглавлениеPRÉFACE
L’art des Jardins a été, plus qu’aucun autre peut-être, enseigné, discuté, célébré. C’est par centaines qu’il faudrait compter les volumes de tout format publiés seulement depuis un siècle, en France et à l’étranger, en prose et en vers, en langage technique et en style sentimental, sur cet art «innocent et doux» et sur les diverses spécialités qu’il embrasse. Mais personne encore ne s’est occupé d’en retracer l’histoire. Dans les ouvrages même les plus considérables, par exemple dans la grande Encyclopédie de Loudon, l’histoire des Jardins ne figure qu’à titre d’introduction, et sous une forme qui n’a rien d’attrayant ni de bien instructif.
J’ai donc entrepris une œuvre nouvelle, en étudiant, sous un point de vue trop négligé jusqu’ici, un sujet qui peut d’ailleurs passer pour rebattu.
Les amateurs de jardins, les horticulteurs ne doivent point chercher dans ce livre des instructions techniques sur le choix et l’emploi du terrain, la disposition des parterres et des bosquets, l’entretien, la ultiplication et la fabrication (le terme est reçu aujourd’hui, et il est exact) des fleurs, des plantes ornementales et potagères et des arbres fruitiers. Ces matières sont traitées dans un grand nombre d’ouvrages spéciaux et par des hommes spéciaux, avec une compétence que je ne possède point.
Ce que j’offre aux gens du monde, aux artistes, à tous les esprits curieux de connaître dans leurs développements successifs et sous leurs formes diverses les créations du génie de l’homme, ce sont des récits, des descriptions, et aussi quelques considérations que je puis bien appeler philosophiques; car l’histoire des Jardins a, comme toute autre, sa philosophie, sa moralité. Elle se rattache par des liens étroits à l’histoire des arts, des sciences, des institutions civiles, politiques et religieuses, des mœurs, de la civilisation en un mot, et, de plus, à l’ensemble des phénomènes inhérents au climat de chaque pays et à la nature de ses productions. D’où l’on voit que son champ est, en définitive, très-vaste, que ses aspects sont très-variés, et qu’un tel sujet peut bien, sans être épuisé à beaucoup près, remplir un gros volume.
Ma tâche était sans doute attrayante, mais néanmoins laborieuse. difficile et, en quelques points, très-délicate. Les matériaux que j’avais à employer se trouvaient en partie disséminés dans une multitude d’ouvrages et d’opuscules de toutes sortes, d’où j’ai dû les extraire «à grand renfort de besicles», à peu près comme les chercheurs d’or extraient de masses énormes de sable et de gravier le précieux métal objet de leur convoitise. J’ai partout, dans le cours de ce livre, cité scrupuleusement mes auteurs, et je puis, en conséquence, me dispenser de les nommer ici.
Une autre partie des matériaux n’existait, pour ainsi dire, qu’à l’état élémentaire: il fallait non-seulement les trouver, mais les découvrir, les dégager de leur gangue, les rectifier les uns par les autres. J’ai dû, pour cette partie ardue de mon travail, recourir aux lumières de plusieurs personnes vouées particulièrement, soit à la pratique de l’art des jardins ou à la science botanique, soit à la recherche assidue des curiosités historiques, et m’approprier les souvenirs des voyageurs et des touristes qu’il m’était permis d’interroger.
Je dois surtout de vifs remercîments, pour leur bienveillant concours, à MM. Barillet-Deschamps, Bühler aîné et Eugène Bühler, si justement célèbres comme architectes-paysagistes; à M. Houllet, le savant directeur des serres au Muséum d’histoire naturelle de Paris; à M. J. Lesage, voyageur agronome, qui a parcouru en observateur attentif presque toute l’Europe et une partie du nouveau monde; à M. Charles Durier, littérateur et touriste, qui a vu et bien vu les beaux jardins de la belle Italie; à M. H. Giacomelli, qui n’est pas seulement un dessinateur charmant, mais un véritable érudit en matière d’art; à M. Ferdinand Denis, qui m’a ouvert généreusement les trésors de son savoir, et a bien voulu révéler lui-même à mes lecteurs les merveilles disparues des jardins de l’ancienne Amérique.
Qu’il me soit permis enfin de ne pas omettre, dans l’expression de ma gratitude, mes excellents éditeurs et les artistes éminents auxquels ce livre doit, avec ses attraits extérieurs, une grande partie de son intérêt. Je me suis efforcé d’en faire une œuvre historique et littéraire: y ai-je réussi? Ce n’est pas moi qui puis le dire. Ils en ont fait, eux, une œuvre d’art. A ce titre du moins les Jardins n’auront à redouter, je l’espère, ni les jugements sévères, ni l’indifférence du public.
ARTHUR MANGIN.
Paris, février1867.