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Pisé.
ОглавлениеLe pisé est un genre de construction en terre, servant à faire des murs, en usage dans plusieurs parties de la France, surtout dans le Midi et dans les pays méridionaux de l’Europe. Lorsque les murs en pisé sont faits avec soin, ils ne forment qu’une seule pièce, et lorsqu’ils sont revêtus à l’extérieur d’un bon enduit, ils peuvent durer longtemps. On se sert principalement du pisé pour les constructions de la campagne.
Les terres qui ne sont ni trop grasses ni trop maigres sont propres à faire le pisé. La meilleure est la terre franche, un peu graveleuse. Toutes les fois qu’avec une pioche, une bêche ou une charrue, on enlève des mottes de terre qu’il faut briser pour les désunir, cette terre est convenable pour faire du pisé. Les terres cultivées, les terres de jardin, les terres naturelles, formant des berges qui se soutiennent presque à plomb, ou avec peu de talus, sont bonnes aussi à cet usage.
Pour faire du pisé, il faut écraser la terre et la faire passer par une claie moyenne pour en extraire les pierres qui excéderaient la grosseur d’une noix. Si la terre est trop sèche, on la mouille en l’aspergeant, et en la remuant à mesure avec une pelle pour l’humecter également. Il suffit qu’elle soit un peu humide, de manière qu’en en prenant une poignée elle puisse, lorsqu’on la rejette, conserver la forme qu’on lui a donnée en la pressant un peu dans la main.
Lorsque la terre est ainsi préparée, on la met dans une espèce de moule ou encaissement mobile, où elle est battue avec un pilon.
Ce moule mobile est formé : 1° de deux tables en bois de sapin que les piseurs des environs de Lyon appellent banches, composées de planches solidement assemblées et fortifiées par des traverses et enfin munies de poignées, 2° de châssis pour soutenir les deux banches: ces hanches ont ordinairement 3 mètres de longueur sur 0m,90 ou 1 mètre de hauteur. L’épaisseur du mur donne l’écartement des deux banches, écartement qui est variable et arbitraire.
Le pisé doit être élevé sur un soubassement soit en pierre, soit en brique, pour le préserver de l’humidité qui pourrait facilement le détériorer.
Les banches ajustées en place, on met entre elles une couche de terre d’environ 0m,10 d’épaisseur qu’on étale avec les pieds; ensuite cette terre est massée au moyen d’un pilon jusqu’à ce qu’elle soit réduite à peu près de la moitié de son épaisseur. On continue cette opération jusqu’à ce que l’encaissement soit rempli. La couche de terre doit être terminée par des plans inclinés à 60 degrés.
L’encaissement rempli, on le démonte et on le repose à la suite pour former un nouveau massif de même forme que le précédent, et qui se relie avec lui par un joint incliné à 60 degrés.
Quand une assise de pisé est faite, en procédant comme nous venons de le dire, on en commence une autre en s’y prenant de la même manière, mais en observant toutefois d’incliner les faces de joint à 60 degrés en sens inverse, en passant d’une assise à une autre et en faisant tomber les joints de l’assise supérieure sur le milieu de l’assise inférieure, comme on le pratique dans la construction de la brique et de la pierre de taille.
Pour construire l’angle droit d’un mur, il faut ajouter à l’extrémité où se trouve cet angle, une troisième banche, que l’on fixe solidement, cependant de manière à pouvoir être facilement démontée, une fois le moule mobile rempli. Il faut aussi que les assises d’angle soient montées en liaison, c’est-à-dire en faisant recouvrir l’assise faite dans une des deux directions de l’angle par celle qui se trouve dans la direction perpendiculaire ou d’équerre, de manière à obtenir un véritable enchevêtrement des assises successives aux angles.
Lorsque les murs de pisé sont terminés, il faut, avant de lès recouvrir d’un enduit quelconque, les laisser bien sécher pendant quelque temps, en raison de la température du pays et de la saison où ils ont été faits. L’expérience a prouvé que dans un pays tempéré, comme le département du Rhône, par exemple, les murs en pisé de 0m,48 à 0m,55 d’épaisseur, achevés vers le commencement de mai, étaient assez secs à la fin de septembre ou au commencement d’octobre, pour être recouverts d’enduits, et que ceux qui étaient achevés en juillet, et même en août, pouvaient encore être-enduits avant l’hiver; enfin, que pour ceux terminés plus tard il fallait attendre au moins six mois après l’achèvement de l’ouvrage. Il est inutile de dire que si ce terme arrivait dans un temps de gelée ou à une époque où elle serait encore à craindre, il faudrait différer. Il est encore convenable de ne pas construire les murs en pisé dans les temps humides et pluvieux.
Au lieu d’employer de la terre argileuse pour faire le pisé, on se sert dans les pays du nord et du centre de l’Europe, d’un mélange de chaux et de sable additionné soit de brique ou de tuileau pilé, soit de cendre de forge, de pouzzolane ou de ciment en petite quantité, le tout fortement pilonné dans des moules entièrement semblables à ceux du pisé ordinaire.
Voici quelques compositions de cette sorte de pisé qui sont données comme ayant parfaitement réussi.
On obtient ainsi un pisé d’une prise assez prompte pour les cas ordinaires.
Lorsqu’on veut une prise plus rapide et une dureté plus grande, on emploie:
Tout le secret de celte fabrication, une fois le mélange convenablement composé et humecté, consiste dans le pilonnage, qui doit être aussi complet que possible.
On peut confectionner de cette façon des blocs de pierre factice en forme parallélipipédique, qu’on maçonne ensuite comme les pierres de taille ordinaires.
Quand les murs de pisé sont bien construits, ils durent longtemps, témoins ceux d’Espagne élevés par Annibal, et qu’on voyait encore avec étonnement deux siècles plus tard au dire de Pline l’Ancien. Il paraît qu’à Marseille on se servait, d’après Vitruve, au lieu de tuiles, de pisé mêlé de paille, pour couvrir les maisons.
On fait aussi des voûtes en pisé.