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CHAPITRE X

Table des matières

Une après-midi, Répataïvo s’annonça, escorté de son inséparable intendant. Dès qu’il fut entré, j’allai lui demander pourquoi il se permettait de renverser à terre, une femme qui ne l’offensait nullement, et qu’il était de mon devoir de protéger.

Naturellement, il s’excusa sur l’usage et la nécessité ; mais ces raisons me parurent si peu satisfaisantes, que je gratifiai ce majestueux personnage de deux soufflets bien appuyés.

Aussitôt le brave homme prit ses jambes à son cou, et se mit à courir comme un lièvre. Quant à son fidèle intendant, et contrairement aux règles de l’étiquette en usage dans les cours, il précéda son maître, cette fois, et s’enfuit dès le premier soufflet, ce qui me parut extrêmement regrettable; car il me semblait que ce monsieur était conformé expressément pour recevoir des coups de poing, et j’aurais éprouvé un agréable soulagement à le rosser selon son mérite.

A partir de ce jour, la Fleur-des-eaux commença à n’être pas fort rassurée sur mon compte. Selon elle, les Falangs (Européens), en général, devaient être des modèles de politesse et d’urbanité, et maintenant elle se voyait, avec une crainte mêlée de regrets, l’esclave d’un homme tout au plus à la hauteur d’un sauvage, pour l’indulgence; c’est pourquoi elle se mit en tête de m’éviter.

Je la laissai agir à sa guise, et n’eus pas l’air de m’en préoccuper le moins du monde. Cependant, voyant qu’à la fin j’étais toujours le même à son égard, elle se rapprocha de moi. C’était là mon but, puisque cela m’amena à lui demander si elle se considérait comme ma femme ou comme mon esclave.

— Comme ton esclave, dit-elle.

— Alors je vais me marier.

— Tiens, j’y pense, se mit-elle à dire aussitôt, voilà au moins trois jours que nous n’avons mangé de poisson. La mer est belle, je vais plonger et choisir. Sois sans crainte et au revoir.

Puis elle partit sans attendre davantage.

Si vous voulez connaître l’art d’évincer les questions, consultez le beau sexe de l’île d’Oualan.

Singulière femme, dis-je en moi-même.

En effet, depuis que nous étions mariés, elle s’était constamment tenue sur une réserve qui eût fait honneur à la vestale la plus digne de ce nom. A part cela, sa bonté, sa douceur, son dévouement étaient inimaginables.

Je comprenais déjà bien son langage, et elle-même se trouvant connaître l’espagnol, apprenait le français avec une grande facilité ; mais qui était-elle, d’où venait-elle et que voulait-elle? Voilà ce que j’ignorais absolument.

Une histoire au-dessus du crocodile

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