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§ 1. — Etendue et divisions du Poitou.

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Table des matières

I. Difficulté de préciser les limites de la région étudiée. — II. Les sénéchaussées poitevines. — III. Le Loudunais et les marches communes.

I. — Notre travail s’étend d’une façon générale à la région poitevine, et d’une manière toute spéciale, parce que les documents s’y présentent très complets et en groupes compacts, aux contrées environnant Civray, Niort et Saint-Maixent.

Il est assez difficile de définir avec une précision absolue les bornes du Poitou. Le mot province ne représente rien de bien précis aux hommes du XVIIIe siècle , et bien que le Poitou fût peut-être une des grandes régions françaises dont l’étendue et la configuration géographique sont le plus faciles à déterminer, il serait périlleux d’en donner une description qui convienne à toutes les divisions administratives, judiciaires, ecclésiastiques et financières qui morcelaient le pays. Les contemporains eux-mêmes n’entrent pas dans des détails d’une netteté parfaite. L’abbé Expilly définit ainsi le Poitou: «Province avec le titre de comté et de gouvernement général militaire... bornée au nord par la Bretagne, l’Anjou et la Touraine; au sud par l’Angoumois, la Saintonge et l’Aunis; au sud-est par le Limousin; à l’est par la Marche et le Berry; à l’ouest par l’Océan ... Pour ce qui concerne les finances, le Poitou forme un département général connu sous le nom de généralité de Poitiers.» La définition est assez vague; il importe de la préciser, spécialement en ce qui peut concerner la préparation des Etats généraux.

La convocation des Etats généraux fut un acte d’administration judiciaire. Elle eut lieu par bailliages ou sénéchaussées. On cherchera donc dans la région sans limites très précises dénommée Poitou les sièges royaux chargés de jouer un rôle dans la convocation, et le travail embrassera tout le territoire relevant de ces divers sièges de justice. Le problème géographique ainsi posé aboutit à une solution plus facile. Dans l’état des bailliages et sénéchaussées annexé au règlement du 24 janvier 1789, on lit à la colonne des bailliages qui députeront directement, deux noms qui appartiennent à coup sûr à la région poitevine: le bailliage du Poitou et la sénéchaussée de Châtellerault; au premier de ces deux sièges se rattachent les sénéchaussées secondaires de Civray, Saint-Maixent, Fontenay-le-Comte, Lusignan, Montmorillon, Niort et Vouvant séant à la Châtaigneraie, en tout sept sièges secondaires ayant pour rôle d’envoyer à Poitiers le quart des membres convoqués à leur assemblée préliminaire, pour y prendre part à la réunion générale. Toutes ces villes font partie de la région poitevine. En recherchant le ressort qu’elles embrassent et en bornant les recherches à ce ressort, le travail s’étendra à une région assez bien délimitée .

II. — Le Poitou sera donc considéré dans ce travail comme l’ensemble des ressorts judiciaires, bailliages et sénéchaussées, ayant leur chef-lieu dans la région poitevine et appelés par l’état annexé au règlement royal du 25 janvier à servir de circonscriptions électorales.

Ces sénéchaussées et bailliages sont fort inégaux et très irrégulièrement découpés. Ayant pour origine première les anciens fiefs seigneuriaux, ils s’étendent au ressort de ces derniers, et suivent leur morcellement infini; les enclaves y sont nombreuses et les paroisses contestées y abondent. Ces circonscriptions judiciaires ne peuvent être comparées à des circonscriptions modernes, aux limites précises. Sans doute la plus grande partie de leur ressort est déterminée; mais on peut hésiter sur l’attribution à tel ou tel siège d’un bon nombre de paroisses situées sur leurs confins, et les officiers royaux ne se font pas scrupule de se les disputer.

De toutes les sénéchaussées poitevines, celle de Poitiers est de beaucoup la plus considérable; elle s’étend surtout à l’ouest jusqu’à l’Océan, à Noirmoutier et à l’île d’Yeu. Le grand nombre des fiefs rattachés dans le cours des siècles à la capitale du Poitou en explique les dimensions anormales . «A la sénéchaussée présidiale de Poitiers ressortissaient soit nuement, soit par appel, trois cents hautes justices environ .» Cette circonscription comprend à la fois un immense territoire d’un seul tenant, et, vers le sud, des enclaves de grande importance, comme les baronnies de Champagne-Mouton, de Charroux, les marquisats de Chef-Boutonne, Lezay, Aigre, et d’autres de moins considérable étendue: la baronnie de Villefagnan en plein Angoumois et la baronnie du Langon, au centre de la sénéchaussée de Fontenay. En un mot, le siège de Poitiers revendique plus de 500 paroisses, et ses trop grandes dimensions rendront les comparutions plus difficiles et moins complètes que dans les autres ressorts de dimensions plus raisonnables .

La sénéchaussée de. Fontenay-le-Comte, la plus importante après celle de Poitiers, est presque d’un seul tenant. A l’est, quelques paroisses sont séparées du reste du ressort par une pointe du siège de Vouvant; en outre, au sein de la sénéchaussée de Poitiers, quatre paroisses, Saint-Georges-de-Montaigu, Riez, Saint-Hilaire-de-Riez et Croix-de-Vie (les trois dernières formant groupe) dépendent de la capitale du Bas Poitou. Parmi les plus importantes justices qui appartiennent à cette sénéchaussée, on remarque les principautés de la Roche-sur-Yon et de Talmond . Elle embrasse 118 paroisses, bien que l’état de population dressé sur l’initiative de Necker lui en attribue 166.

Très considérable, la sénéchaussée de Montmorillon est partagée en trois parties très distantes qui contiennent 169 paroisses . La plus considérable entoure directement la capitale. Une seconde est constituée par l’ancien bailliage et vicomté de Rochechouart; ce district comprend un grand nombre de justices seigneuriales: «les unes ressortissent directement ou par appel au bailliage ou vicomté de Rochechouart; les autres et le plus grand nombre, à la sénéchaussée de Montmorillon; on ne sait pas l’origine et le titre de cet arrangement ...» La troisième a pour centre Bourganeuf, et se trouve par conséquent à l’est de la capitale du Limousin. L’éloignement du chef-lieu était tel que, le 22 février 1789, les officiers de l’élection de Bourganeuf demandèrent à être convoqués à Limoges et non à Poitiers, dont les séparaient des chemins impraticables. La réclamation ne fut point écoutée, et les habitants durent se résigner à comparaître à Poitiers.

Le siège royal de Niort se composait d’une partie principale assez bizarrement découpée, d’un canton composé de 8 paroisses séparé de cette partie principale par la sénéchaussée de Civray; trois paroisses isolées ressortissaient aussi à Niort; deux d’entre elles, Dampierre-sur-Boutonne et Ensigné, étaient situées au centre de la partie occidentale de la sénéchaussée de Civray; la dernière, la Chapelle-Themer, se trouvait enclavée entre les circonscriptions de Fontenay et Vouvant . La sénéchaussée s’étendait en tout sur 50 paroisses en dehors de Niort d’après le procès-verbal, 51 d’après les états de population et d’après une lettre de Rouget du 4 avril 1789 .

La sénéchaussée de Civray est composée de deux parties presque égales: l’une à l’est, autour de Civray et d’Usson, l’autre à l’ouest, relevant des sièges royaux de Melle, Chizé et Aunay. Quelques paroisses isolées, celles de Beauvoir, à peu de distance de Niort, d’Aizecq, Montembœuf, les Pins et Vitrac, enclavées dans la sénéchaussée d’Angoulême, complètent le nombre de celles qui relèvent de Civray, 117 si l’on en croit le procès-verbal, 113 d’après l’état de population.

La sénéchaussée de Saint-Maixent est presque tout entière ramassée autour de sa capitale. On y trouve seulement cinq enclaves: l’une fort importante, au sud-est, constituée par les paroisses relevant de la baronnie de Couhé ; une seconde, au sud, toute proche de la partie principale, composée de Verrines et Montigny; les trois autres sont formées chacune d’une seule paroisse, Vouillé-les-Marais, au milieu du territoire de la sénéchaussée de Fontenay, Damvix et Pompaire, dans celle de Poitiers . Elle comprend au total 54 paroisses, 73 d’après l’état de population, 68 d’après les archives de la Vendée .

La sénéchaussée de Lusignan est excessivement modeste. Elle serait d’un seul tenant si Lésigny ne devait pas être compté au nombre des paroisses de son ressort . L’état de population lui attribue 29 paroisses.


Le bailliage de Vouvant séant à la Châtaigneraie ne comporte aucune enclave. Il a été démembré de la sénéchaussée de Fontenay en 1698, lors du retour à la couronne de la baronnie de Vouvant . Le bailliage prétend avoir droit sur 82 communautés, mais le siège de Fontenay lui en dispute une vingtaine; l’état de population lui en prête 90 .

Ces deux derniers ressorts et celui du bailliage principal de Châtellerault ne présentent pas les excentricités géographiques des précédents: ils sont suffisamment «arrondis», suivant l’expression des cahiers, pour ne pas présenter les mêmes défauts.

Si l’on considère dans leur ensemble ces circonscriptions si bizarrement découpées, enchevêtrées à plaisir, on voit qu’elles se juxtaposent de telle façon que le Poitou, circonscription électorale, forme un tout compact où les enclaves des provinces voisines sont extrêmement rares . A travers les incertitudes et les morcellements, la vieille province subsiste: elle est quelque chose de plus qu’une expression géographique. Voici quel en est l’aspect général. La région poitevine constitue un territoire très vaste, beaucoup plus étendu de l’ouest à l’est que du sud au nord; elle présente deux particularités remarquables: elle s’étend vers l’est d’une manière insoupçonnée, surtout par son enclave de Bourganeuf, et vers le midi jusqu’à Rochechouart, Champagne-Mouton,Villefagnan. D’autre part l’Anjou , par le bailliage de Saumur, s’enfonce profondément au centre même de la province, et y forme «un angle aigu tellement rentrant dans notre territoire que le sommet de l’angle n’est pas éloigné de plus d’une lieue de notre ville ». Ce territoire est fort éloigné de la capitale du bailliage: de Mirebeau pour aller à Saumur, il faut traverser tout le bailliage de Loudun. A l’inverse, le Puy-Notre-Dame est séparé de Loudun par Montreuil-Bellay, qui dépend de Saumur.

III. — Il est une région que le Poitou ne peut pas revendiquer d’une façon complète, et que cependant l’on ne peut s’empêcher de rapprocher de la région poitevine proprement dite: c’est le Loudunais. Celui-ci, après avoir appartenu aux comtes du Poitou , leur avait échappé. Henri II, par lettres patentes du 16 novembre 1579, l’avait érigé en bailliage . Il avait sa coutume spéciale, relevait en 1789 de la généralité de Tours, et députait directement aux Etats généraux. Mais dans l’incertitude des notions géographiques à la fin du XVIIIe siècle, on peut à certain point de vue dire qu’il appartient encore à l’expression «Poitou». L’Almanach provincial et historique du Poitou revendique pour cette province la ville de Loudun, et Bruzen de la Martinière dit de Loudun: «Ville de France en Poitou.» On profitera de l’hésitation que les contemporains manifestent ainsi pour employer les renseignements intéressants que fournit ce bailliage.

On écartera au contraire ce qui pourrait intéresser quelques paroisses connues sous le nom de marches communes de Poitou et de Bretagne. Tout d’abord il s’agit là d’une région qui n’appartint jamais, à proprement parler, à la province. «Sa Majesté a reconnu que ce pays, qui forme la lisière de ses provinces de Bretagne et de Poitou, n’a jamais été sous la dépendance ni de l’une ni de l’autre de ces provinces ». Mais surtout il s’agit d’une population tout à fait spéciale, pourvue de ses franchises, à l’abri de la milice, des taxes douanières, soumise à une législation particulière et dont les doléances ne peuvent guère être rapprochées de celles que nous avons l’intention d’étudier.

La préparation des États-généraux de 1789 en Poitou

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