Читать книгу Le Barreau de Paris - Maurice Joly - Страница 17

V

Оглавление

Table des matières

Et cependant comment se fait-il qu’avec de si puissantes facultés, Gorgias laisse toujours froids ceux qui l’entendent? C’est que sous l’appareil du langage, il est lui-même toujours glacé ; c’est que son âme ne connaît pas le véritable enthousiasme; toujours paré, toujours attentif à la correction de sa phrase, il ignore les sublimes désordres de l’éloquence, il ne sait pas le chemin du cœur().

Et puis, comment se fait-il encore qu’avec tant de charmes dans l’élocution, tant de ressources dans l’esprit, une secrète monotonie navre tous ses discours, sur lesquels l’ennui répand insensiblement son voile? C’est qu’au fond, il est plus rhéteur qu’orateur, plus descriptif que démonstratif, plus prolixe que clair, plus incisif que concluant, plus âpre que chaleureux, plus opiniâtre que convaincu; l’intérêt, au lieu d’aller croissant dans ses discours, s’endort, se ranime et languit; il finit par briser tout à fait l’attention à force de la disséminer, et il laisse une impression de lassitude plutôt que de satisfaction quand il a terminé ses harangues. Il n’a pas le don de narrer, ce talent qui, chez l’écrivain comme chez l’orateur, se place au premier rang, parce qu’il se compose à lui seul des qualités les plus précieuses: ainsi sa méthode est faible, il expose imparfaitement, il ne coupe pas bien les parties de son discours, il n’observe pas les pauses, chose si importante pour soulager et soutenir le récit; Laërte est trop comédien, il ne l’est pas assez. Il n’a pas l’art de mettre en scène ce qu’il dit, il manque de geste, et son visage durement réfractaire lui refuse tout jeu de physionomie.

Le Barreau de Paris

Подняться наверх