Читать книгу Histoire de l'Empire Romain: Res gestae: La période romaine de 353 à 378 ap. J.-C. - Ammien Marcellin - Страница 27
Chapitre XII
ОглавлениеXII. Les Gaulois sont en général de haute taille ; ils ont le teint blanc, la chevelure blonde, le regard farouche et effroyable. Leur humeur est querelleuse et arrogante à l’excès. Le premier venu d’entre eux, dans une rixe, va tenir tète à plusieurs étrangers à la fois, sans autre auxiliaire que sa femme, champion bien autrement redoutable encore. Il faut voir ces viragos, les veines du col gonflées par la rage, balancer leurs robustes bras d’une blancheur de neige, et lancer, des pieds et des poings, des coups qui semblent partir de la détente d’une catapulte. Calmes ou courroucés, les Gaulois ont presque toujours dans la voix des tons menaçants et terribles. Ils sont universellement propres et soigneux de leur personne. On ne voit qui que ce soit, homme ou femme, en ce pays, en Aquitaine surtout, porter des vêtements sales et déchirés ; rencontre si commune partout ailleurs. Le Gaulois est soldat à tout âge. Jeunes, vieux courent au combat de même ardeur ; et il n’est rien que ne puissent braver ces corps endurcis par un climat rigoureux et par un constant exercice. L’habitude locale en Italie de s’amputer le pouce pour échapper au service militaire, et l’épithète de “murcus” (poltron) qui en dérive, sont choses inconnues chez eux. Ils aiment le vin de passion, et fabriquent pour y suppléer diverses boissons fermentées. L’ivresse, cette frénésie volontaire, comme l’a définie Platon, y est l’état habituel de bon nombre d’individus de la basse classe, qui ne font qu’errer çà et là dans un abrutissement complet ; ce qui justifie le mot de Cicéron dans son plaidoyer pour Fonteius : “Les Gaulois vont mettre de l’eau dans leur vin”. Autant vaudrait, selon eux, y mettre du poison.
La partie de cette région qui avoisine l’Italie a passé sans de grands efforts sous le joug romain. Son indépendance menacée en premier lieu par Fulvius, puis ébranlée fortement dans une suite de petits combats soutenus contre Sextius, fut tout à fait abattue par Fabius Maximus ; avantage que ce dernier n’obtint cependant que par la réduction des Allobroges, nos plus opiniâtres adversaires dans cette lutte, et qui lui valut un surnom. Mais ce ne fut qu’après dix ans de campagnes, comme nous l’apprend Salluste, et diverses alternatives de succès et de revers, que l’universalité de la Gaule ; sauf les cantons rendus inaccessibles par des marais, fut enfin soumise à César, et annexée à l’empire par un lien désormais indissoluble. Mais cette digression nous éntratue trop loin du sujet ; hâtons-nous d’y rentrer.