Читать книгу Les Amours - Auguste de Labouïsse-Rochefort - Страница 24
ОглавлениеÉLÉGIE.
MAGNANIMES rivaux des Gastons, des Nemours,
Plein d’audace, j’allais célébrer votre gloire;
Mon espoir fut trompé ; mon projet, illusoire;
Je vis Éléonore au plus beau de mes jours,
Et, transfuge aussitôt du temple de mémoire,
Je ne chantai que les Amours.
Oh! comme moi, qui n’eût rendu les armes!
La fleur des champs que l’on vient de cueillir
A moins d’éclat, de fraîcheur et de charmes:
Elle embellirait tout, rien ne peut l’embellir.
Ses noirs cheveux en boucles ondoyantes
Voilent son cou de leurs tresses mouvantes;
Elle a dans le regard un doux je ne sais quoi
Qu’on ne peut définir, qu’aucun charme n’égale,
Qui séduit tous les cœurs, les entraîne après soi,
Et fait le désespoir de plus d’une rivale.
Sur son beau front repose la candeur;
Dès qu’on la loue, aussitôt la pudeur
Du plus tendre carmin colore son visage.
Seize printemps ont orné son corsage
Des plus riches trésors qui parent la beauté ;
C’est la Vénus, les Graces du Corrége,
Tous les Amours composent son cortège,
Et dans son port règne la majesté.
Éléonore et m’enflamme et m’inspire.
Interprète du sentiment,
Que mon vers tendrement soupire;
Si le poëte n’est amant,
A s’illustrer c’est en vain qu’il aspire.
Ma voix célèbre et les jeux et les ris;
Enfants des dieux, pastoureaux, et bergères,
En vous livrant à vos danses légères
Entourez-moi, c’est pour vous que j’écris.
Venez aussi, venez, vierges craintives;
Ma plume est chaste, et mon cœur sans détour;
Daignez sourire à mes chansons naïves,
Et couronner un jeune troubadour..
Dans votre érotique langage,
Parny, Bertin, Deguerle, et Duault, et Boufflers,
Vous peignîtes l’Amour libertin et volage;
Enviez mes plaisirs, mes transports, et mes fers,
Je vais chanter l’amour fidèle et sage;
Éléonore est l’objet que je sers.
Elle est si tendre et sur-tout si jolie!
Pour elle Ovide eût délaissé Julie,
Anacréon eût volé sur ses pas;
Les vers légers de l’aimable Catulle,
Les vers plaintifs du sensible Tibulle
Auraient tous à l’envi célébré tant d’appas.
Je le sens, je n’ai pas leur sublime génie.
Oui, je prélude encore aux jeux de l’harmonie,
Je ne le sais que trop: mais qu’importe à mon cœur
Que sur le Parnasse on m’ignore?
Je soupire après le bonheur,
Et j’ai tout, si j’obtiens la main d’Éléonore.
La gloire vaudrait-elle un instant de plaisir?
De chagrins, de regrets, elle est trop tôt suivie;
Mais, quand l’amour est pur, il sait braver l’envie,
Et ne craint pas le repentir.