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DEUXIÈME PÉRIODE

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Table des matières

(1808-1857)

Comptoir d’escompte. — L’article 10 du décret du 16 janvier 1808 avait prévu rétablissement de Comptoirs régionaux. Dès le 18 mai, un décret autorisa la création des Comptoirs de Lyon et de Rouen, ouverts le 10 janvier 1809, et de Lille, ouvert le 29 mai 1810. Les restrictions imposées par les statuts aux escomptes du commerce empêchèrent le développement de ces agences qui furent liquidées en 1813 et 1817.

En 1812, la Banque acheta 5.000 de ses actions. Elle réduisit ainsi son capital, trop élevé, et qui ne pouvait trouver emploi.

Chute de l’empire. — Le crédit de la Banque s’était consolidé, et la circulation atteignait 130 millions en 1814, bien que le commerce n’apportât que peu de papier à l’escompte.

C’est ainsi qu’en 1812, l’encaisse était de 114 millions espèces, pour une circulation de 117 millions, avec un portefeuille réduit à 15 millions, et qui s’abaissa même à 10 millions.

En 1813, les prélèvements effectués pour les besoins militaires amenèrent la réduction de l’encaisse à 26 millions; la circulation était tombée à 85 millions, et le portefeuille commercial s’élevait à 45 millions.

A l’approche des alliés, en janvier 1814, ce fut à nouveau la panique. En une journée, le 19 janvier, la Banque changeait contre espèces 4 millions et demi de ses billets. Peu de jours après, l’encaisse était de 5 millions, la circulation de 10 millions; il fallait limiter les payements à 500.000 francs par jour pour permettre la réalisation du portefeuille et faire face aux engagements. Puis, la Banque elle-même invita ses comptes courants à retirer leurs fonds, et, quand les alliés entrèrent à Paris, ses caves étaient ensablées et les planches à billets détruites.

Restauration. — En novembre 1814, l’Assemblée générale des Actionnaires demanda au Gouvernement une modification des statuts: réduction du capital et droit pour les Actionnaires de nommer le Gouverneur, les Censeurs étant désignés par l’État.

Ces projets n’aboutirent pas, mais 7.100 actions furent rachetées en 1816, ramenant le capital à 67.900.000 francs. Une loi du 5 février 1817 supprima les Comptoirs. Une autre, du 4 juillet 1820, autorisa la répartition du dividende entre les actionnaires.

Les sommes énormes qu’il fallut payer à l’étranger, et les excès de la spéculation, amenèrent une crise très grave en 1918. La Banque prit des mesures habiles: pour sauver l’encaisse, elle abaissa le maximum de la durée des effets de 90 à 60 jours, puis à 45 jours. Le taux de l’escompte fut maintenu à 5 %, et le remboursement des billets resta assuré. Ces mesures, très critiquées, eurent toutefois le résultat cherché ; quatorze jours après, la limite de l’escompte était relevée à 60 jours, et le 12 novembre 1818 à 90 jours, chiffre auquel elle devait rester fixée trente-sept ans.

A cette époque, enfin, des ordonnances autorisèrent l’établissement de banques départementales ayant le privilège d’émettre des billets dans les villes où elles devaient s’établir. Nous y reviendrons plus loin.

Une crise industrielle atteignit l’Angleterre en 1825, sans que la France en ressentît beaucoup le contrecoup. La Banque put avancer 3 millions à la Banque d’Angleterre, sur dépôts de lingots.

La Banque passa sans encombre la période mouvementée de la Révolution de 1830, malgré la perturbation des affaires. Elle prêta 4 millions au Comptoir d’escompte fondé à Paris pour venir en aide au commerce et à l’industrie, et qui fonctionna d’octobre 1830 à 1832.

Une loi, votée le 17 mai 1834, autorisa les avances sur effets publics français à échéance non déterminée, et créa le fonds de réserve.

Banques départementales. — Dès 1817, des établissements d’émission avaient été fondés en province: la banque de circulation de Rouen, le 17 mai 1817; celle de Nantes, le 11 mars 1818; de Bordeaux, le 23 novembre 1818. Puis, après la Révolution de 1830, ce furent successivement Lyon (19 juin 1835), Marseille (29 septembre 1835), Lille (29 juin 1836), Le Havre (25 août 1837), Toulouse (11 juin 1838).

Les opérations réservées à ces banques étaient fort limitées, et, partout, leur action réduite: il leur était défendu d’escompter des effets à deux signatures, de faire des opérations hors de la ville où elles étaient établies, d’avoir des correspondants et, à plus forte raison, des succursales; de bonifier un intérêt à leurs déposants; d’émettre des billets de petites coupures. Aussi, lorsqu’en 1840 le renouvellement du privilège de la Banque de France fut envisagé, demandèrent-elles la modification de leurs statuts et surtout l’extension de leurs opérations. Leur requête fut sans succès, et elles furent absorbées par la Banque en 1848, lorsque le cours forcé entraîna la nécessité d’un billet de banque uniforme.

Renouvellement du privilège (1840). — Le concours donné par la Banque au commerce et à l’industrie était de plus en plus considérable, et sa situation parfaitement équilibrée. En juillet 1839, il lui fut possible d’escompter à la Banque d’Angleterre pour 2 millions de livres, et de l’aider ainsi, pour la seconde fois, à franchir une passe difficile. Les pouvoirs publics ne voulurent pas attendre l’expiration du délai (24 septembre 1843) fixé par la loi de 1806 pour renouveler son privilège.

La loi du 30 juin 1840 prorogea ce privilège jusqu’au 31 décembre 1867, avec la réserve qu’on pourrait le faire cesser ou le modifier dès 1855. La même loi décidait qu’aucune banque départementale ne pourrait être établie qu’en vertu d’une loi. Elle réduisait officiellement le capital de la Banque à 67.900 actions de 1.000 francs, admettait les effets publics français en remplacement de la troisième signature, décidait qu’il serait publié tous les trois mois une situation de la Banque, et tous les six mois, un exposé du résultat des opérations du semestre.

Loi du 30 juin 1840 portant prorogation du privilège de la Banque de France.

ART. 1er. — Le privilège conféré à la Banque de France par. les lois des 24 germinal an XI et 22 avril 1806 est prorogé jusqu’au 31 décembre 1867.

Néanmoins, il pourra prendre fin ou être modifié le 31 décembre 1855, s’il en est ainsi ordonné par une loi votée dans l’une des deux sessions qui précéderont cette époque. (Le second paragraphe de l’article 1er a été abrogé par l’article 3 du décret ayant force de loi, du 3 mars 1852.)

ART. 2. — Le capital de la Banque de France, représenté par soixante-sept mille neuf cents actions de mille francs chacune, ne pourra être augmenté ou diminué que par une loi spéciale.

ART. 3. — Les effets publics français de toute nature pourront être admis comme garantie dans le cas prévu par l’article 12 du décret du 16 janvier 1808.

ART. 4. — Les escomptes de la Banque de France auront lieu tous les jours, excepté les jours fériés.

ART. 5. — Le Ministre des Finances publiera tous les trois mois un état de la situation moyenne de la Banque pendant le trimestre écoulé.

Il publiera tous les six mois le résultat des opérations du semestre et le règlement du dividende.

ART. 6. — Les Comptoirs d’escompte de la Banque de France ne pourront être établis ou supprimés qu’en vertu d’une ordonnance royale, rendue sur la demande de son Conseil général, dans la forme des règlements d’administration publique.

ART. 7. — Pourront être autorisées par des ordonnances rendues dans la même forme, et sur la proposition du Conseil général de la Banque, les modifications qu’il serait nécessaire d’apporter aux dispositions du décret du 18 mai 1808, sauf toutefois les articles 42 et 43 dudit décret, qui ne pourront être modifiés que par une loi.

ART. 8. — Aucune Banque départementale ne pourra être établie qu’en vertu d’une loi.

Les Banques existantes ne pourront obtenir que par une loi la prorogation de leur privilège, ou des modifications à leurs statuts.

ART. 9. — A dater de la promulgation de la présente loi, les droits de timbre à la charge de la Banque seront perçus sur la moyenne des billets au porteur ou à ordre qu’elle aura tenus en circulation pendant le cours de. l’année.

A partir du 1er janvier 1841, le même mode de perception sera appliqué aux Banques autorisées dans les départements.

Création des succursales. — Après la création de banques départementales, et voyant le succès qu’elles obtenaient, malgré les entraves mises à leurs opérations, la Banque avait tenté de fonder des Comptoirs.

Le premier fut établi à Reims, le 6 mai 1836, puis à Saint-Étienne le 17 juin 1836; à Saint-Quentin, le 16 octobre 1887; à Montpellier, le 19 janvier 1838; à Grenoble, le 31 mars 1840; à Angoulême, le 24 avril 1840.

Ces comptoirs, en relations avec la Banque, escomptaient les effets sur diverses places: en 1840, leur portefeuille était, pour les deux tiers, composé d’effets sur Paris. L’ordonnance royale du 24 mars 1841 fixa les conditions de leur établissement, qui ont peu varié depuis. Leur développement se continua sans arrêt: Besançon, Caen, Châteauroux, Clermont-Ferrand fonctionnèrent en 1841; Mulhouse, en 1843; Le Mans, Nîmes, Strasbourg, Valenciennes, en 1846. Leur action s’étendait tous les jours; chaque comptoir ajoutait à la prospérité des autres.

Crise de 1846-47-48. — Pendant la période qui s’étend de 1840 à 1846, les affaires étaient prospères, le crédit et la considération dont jouissait la Banque étaient immenses. On commençait l’exécution des grands travaux de chemins de fer qui absorbèrent, en 1846, 700 millions.

Cette même année (1846), la récolte des céréales fut déficitaire en Europe; la France et l’Angleterre se virent dans la nécessité de faire des importations considérables, et il en résulta une demande extraordinaire d’espèces métalliques. L’encaisse qui, dans les premiers mois de l’année, avait atteint 252 millions, descendit à 80 millions. Le taux de l’escompte fut élevé à 5 % et la Banque céda au Gouvernement russe 50 millions de rentes françaises.

Cette crise monétaire fut suivie par contre-coup, en 1847, d’une crise de capitaux, cause elle-même d’une crise commerciale. La Banque les surmonta par des mesures habiles, en escomptant largement les présentations des banquiers, en ramenant le taux de l’escompte à 4 %, en achetant elle-même des rentes, opération qui soutint les cours et permit la réalisation des réserves particulières.

C’est pendant cette crise commerciale que survint la Révolution. Dès lors, ce fut la panique, à laquelle la Banque de France résista vaillamment. En quinze jours, elle escompta 153 millions, dont 110 à Paris; elle remboursa 77 millions au Trésor, à Paris, et 11 dans ses comptoirs; elle secourut largement les banques départementales de Rouen et du Havre. Néanmoins, la panique continuait. En un jour, l’encaisse de Paris tombait de 70 à 59 millions, et le Conseil général dut demander que les billets de banque «fussent considérés comme monnaie légale sur tout le territoire de la République». Le décret du 15 mars 1848 établit alors le «cours forcé ». Les billets devenaient monnaie légale; la Banque était dispensée de les rembourser, et le maximum de l’émission était fixé à 350 millions.

Le même décret autorisait l’émission de coupures de 100 francs, et ordonnait la publication hebdomadaire du bilan de la Banque.

Ces mesures, que la Banque avait elle-même sollicitées, jointes à l’habileté dont elle fit preuve, et qui n’était pas exempte d’une certaine hardiesse, rétablirent rapidement la situation; dès le 6 août 1850, une loi abrogeait le décret du 15 mars 1848, en ce qui concernait le cours forcé.

Cependant, en raison du cours forcé, il devenait nécessaire de rendre le billet de banque uniforme, et les Banques départementales furent absorbées par la Banque de France (décrets des 27 avril et 2 mai 1848). La fusion des actions eut lieu au pair; le capital de la Banque était porté à 91.250.000 francs, la limite de l’émission à 452 millions, puis à 525 millions (loi du 22 décembre 1849).

Ainsi devenue seule Banque d’émission, la Banque de France eut un essor rapide; elle entreprit de soutenir le crédit du commerce et celui de l’État.

Rôle de la Banque. — Il est nécessaire de préciser le rôle de la Banque de France pendant cette période troublée. Son action se manifesta d’abord par l’extension de ses opérations d’escompte, qui, de 96 millions en 1847, s’élevèrent, en 1848, à 436 millions.

Le 31 mars 1848, elle prêtait à l’État, sans intérêt, 50 millions contre dépôt de bons du Trésor. Le 5 mai, la Caisse des Dépôts et Consignations lui empruntait 30 millions sur transfert de rentes; le 3 juin, elle ouvrait au Trésor un compte courant de 150 millions. Elle apporta encore son aide aux villes de Paris et de Marseille, au département de la Seine, aux hospices de Paris et de Lyon, pour une somme globale d’environ 20 millions.

La grande métallurgie subissait alors une crise; la Banque la secourut en lui consentant des prêts sur hypothèques, pour 34 millions. Les prêts sur dépôts de marchandises — autorisés par un décret du 26 mars 1848 — dépassèrent 60 millions. Cependant, les effets en souffrance s’élevèrent, en 1849, à 84 millions.

Pour la première fois depuis sa création, la Banque s’était trouvée soutenue par la confiance générale. Après le premier moment de panique, le crédit des billets s’était rétabli, et dès 1849, alors que le cours forcé était encore en vigueur, le commerce refusait les espèces et réclamait des billets, dont l’émission atteignait la limite légale. La Banque dut obliger ses clients à recevoir en or toute somme inférieure à 5.000 francs; on payait une prime pour obtenir un billet contre des louis.

Les encaisses et les dépôts ne firent qu’augmenter, et en octobre 1851 l’encaisse excédait de 110 millions la somme des billets en circulation.

Le 27 novembre 1851, à la veille du coup d’État du 2 décembre, la Banque dut, sous la pression du Gouvernement, verser au Trésor une somme de 25 millions.

En 1852, divers décrets l’autorisèrent à faire des avances sur les actions et obligations des Chemins de fer français, puis sur des obligations de la Ville de Paris. — Les capitaux abondaient dans ses caisses, qu’elle fit agrandir; le taux de l’escompte fut abaissé à 3 %.

Bientôt, toutefois, les émissions de titres industriels, la guerre, les emprunts, amenèrent de nouveaux besoins, et bien que le privilège n’expirât qu’en 1867, le Gouvernement impérial décida de le renouveler dix ans avant l’époque fixée.

Traité des opérations de banque, de bourse et de change, à l'usage des capitalistes, des employés de banque et des candidats aux administrations financières

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