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I. — L’ÉCHANGE ET LE CRÉDIT

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Table des matières

Dans les sociétés primitives et chez les peuples arriérés, les individus vivent du produit de leur. chasse, de leur pêche ou de leur récolte, et chaque famille se suffit à elle-même, fabriquant ses armes, ses outils, ses vêtements, en un mot produisant tout ce qui est nécessaire à la satisfaction de ses besoins.

Par la suite, apparaissent certains germes de civilisation qui incitent plusieurs familles à se réunir en tribus, puis en peuplades. Dans ces agglomérations, certains individus commencent à se livrer de préférence aux travaux ou. aux occupations qui leur plaisent davantage, ou pour lesquels ils se sentent plus d’aptitude, ou encore auxquels ils ont été initiés par leurs parents. Il y a là un commencement de la division du travail: tandis que certains hommes continuent à chasser, à pêcher, à cultiver la terre, d’autres fabriquent soit des armes et des outils, soit des vêtements, construisent des habitations, se chargent de la mouture ou de la préparation des graines et des fruits, de la cuisson du pain, etc...,

Pour pouvoir subvenir à leurs besoins, ces individus spécialisés troquent leurs produits fabriqués ou échangent leurs services contre le gibier, le poisson ou les produits du sol nécessaires à leur subsistance, ou contre des objets fabriqués par d’autres individus, et dont ils ont besoin. Ce troc constitue la première phase de l’échange.

Plus tard, la civilisation se développant, ces premiers échanges, devenant de plus en plus nombreux, deviennent aussi plus difficiles: le fabricant d’armes et d’outils peut bien’échanger des armes contre du gibier, mais s’il a besoin de graines ou de farine, le cultivateur ou le meunier n’auront pas besoin indéfiniment d’outils, et le troc avec eux ne sera plus possible., Il devient donc nécessaire de faire intervenir dans les échanges une marchandise intermédiaire dont tout le monde a besoin, et qui est, par conséquent acceptée par chacun en paiement de ses produits ou de ses services. Suivant les pays et les époques, cette marchandise intermédiaire, servant de commune mesure des valeurs; peut être du blé, du maïs, des moutons, du sel, etc... Il y. a quelques années, on se servait encore dans diverses régions du Thibet de plaques de thé comprimé.

Mais de plus en plus les peuples recherchent, comme marchandises intermédiaires des échanges, celles, qui remplissent le mieux ce rôle: il faut qu’elles soient parfaitement divisibles pour qu’elles puissent former l’équivalent d’objets de valeur infime, ou marquer une différence à peine sensible dans la valeur de deux objets très peu dissemblables. Il faut que ces marchandises intermédiaires soient en outre d’une nature homogène pour. que la même quantité ou le même poids de leur matière ait toujours la même valeur. Il faut aussi qu’elles soient d’une durée indéfinie, pour pouvoir être mises de côté et gardées longtemps sans subir d’altération. Et elles doivent, enfin, le plus possible, représenter une grande valeur sous un faible poids et sous un faible volume pour pouvoir être conservées et transportées facilement. Les hommes arrivent ainsi, en se civilisant de plus en plus, à choisir et à adopter comme marchandises intermédiaires, répondant le mieux à ces exigences, le fer ou le cuivre, puis l’argent et l’or, qui doivent être pesés à chaque échange.

Lorsque les peuples s’organisent en nations, la division du travail s’accentue davantage, surtout dans les agglomérations d’individus, et les échanges deviennent plus nombreux. L’inconvénient d’avoir à peser les lingots à chaque transaction amène les autorités dirigeantes à faire fondre le métal choisi comme commune mesure des échanges, en lingots de valeur fixe. Sur ces lingots, elles apposent des poinçons indiquant le poids et la valeur, et peu à peu ces lingots prennent leur forme définitive qui est celle de la monnaie.

Ce stade de l’évolution économique d’un peuple, qu’on pourrait appeler «l’âge de la monnaie», subsiste en général assez longtemps, car cette monnaie suffit pendant une longue période à tous les échanges ou transactions, non seulement entre les négociants et les trafiquants de ce peuple, mais même avec les commerçants des peuples voisins.

De part et d’autre, on a recours à des changeurs spécialisés dans l’achat, l’envoi et l’échange des diverses monnaies. Ces intermédiaires, qui bornent d’abord leur rôle à peser et à titrer les lingots et les monnaies pour les échanger, puis les envoyer à destination, se chargent par la suite d’effectuer des paiements dans telle ou telle localité éloignée. Ils simplifient bientôt cette besogne et évitent les difficultés et les dangers qu’elle comporte, au moyen de lettres de change, c’est-à-dire d’écrits invitant un de leurs collègues d’une autre ville, à verser à son destinataire la somme fixée. Le premier changeur vend la lettre de change au négociant qui a l’envoi d’argent à effectuer. Ce négociant envoie donc simplement cet écrit à son fournisseur éloigné qui pourra en toucher le montant chez le changeur de sa résidence.

C’est l’introduction de l’usage de la lettre de change qui inaugure une nouvelle période de l’évolution économique, celle du crédit. Elle remonte d’ailleurs assez loin, puisqu’on trouvait en Grèce, puis à Rome, des changeurs fort habiles.

Bientôt, en effet, les changeurs appelés aussi banquiers (de ce qu’à leur origine les changeurs italiens se tenaient pendant les foires sur un simple banc: banca) étendent le champ de leurs opérations: ils reçoivent des dépôts d’argent pour les faire fructifier ou pour faire des paiements pour leur compte, et les divers négociants d’une même province trouvent commode d’avoir des dépôts chez un ou plusieurs banquiers, et de se régler leurs échanges au moyen de virements sur leurs comptes.

Mais par suite du développement et du perfectionnement de la production, en vue des échanges toujours plus nombreux et plus étendus, il faut aux fabricants et aux commerçants des fonds de roulement importants. Les fabricants ont besoin d’acheter des matières premières, de payer leur main-d’œuvre, leurs outils et leurs machines avant de pouvoir écouler leurs produits fabriqués. Les commerçants ont besoin pour satisfaire leur clientèle de stocks considérables, offrant un choix très varié, de vastes magasins et de personnel nombreux. Pour grossir ce fonds de roulement nécessaire, ils empruntent des capitaux à des commanditaires qui sont souvent des banquiers; mais ils cherchent aussi à ne pas le grossir inutilement et, dans ce but, ils prennent l’habitude de ne régler leurs achats qu’après un certain délai. Ainsi le fabricant aura eu lé temps de transformer ses matières premières en objets fabriqués, et, à son tour, le commerçant aura eu le temps de vendre tout ou partie des marchandises achetées, avant que matières premières et marchandises n’aient été payées. La confiance que ces divers fabricants et négociants ont les uns dans les autres pour consentir à se livrer des marchandises non pas contre paiement de bonne monnaie, mais sur simple promesse d’un paiement différé, fut, dès son origine, appelée de son nom actuel: le crédit .(du latin credere, croire, avoir confiance).

Entre temps, les négociants ont trouvé le moyen de s’affranchir de l’entremise des banquiers pour les règlements à distance en créant eux-mêmes des lettres de change payables par un de leurs débiteurs à un de leurs créanciers dans une même localité éloignée.

Mais, comme les factures ou les lettres de change ne sont payables qu’après un délai plus ou moins long, les banquiers trouvent le moyen d’offrir encore leurs services en achetant mmédiatement aux fabricants ou négociants leurs factures ou leurs lettres de change qu’ils conservent pour les encaisser le jour de leur échéance.

Ils prélèvent donc sur le prix de la facture ou de la lettre de change, ainsi payées d’avance par eux, une certaine somme appelée «escompte», représentant l’intérêt de l’argent avancé, le coût de l’encaissement, la compensation du risque couru, et le bénéfice légitime de leur entremise. Et par la suite, en se développant, cette opération prend le nom général d’escompte, et constitue une des formes les plus perfectionnées du crédit.

Traité des opérations de banque, de bourse et de change, à l'usage des capitalistes, des employés de banque et des candidats aux administrations financières

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