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De l’épaisseur des murs
ОглавлениеIl n’y a pas de lois absolues pour l’épaisseur des murs et des piliers, parce que ces lois sont soumises à diverses exigences et conditions qui varient à l’infini, selon les circonstances.
Nous n’appellerons donc l’attention du constructeur que sur les conditions essentielles qui régissent cette question, et que nous ne lui indiquerons que comme jalons qui pourront le guider dans certains cas.
L’épaisseur d’un mur dépend de la charge qu’il doit supporter ainsi que du poids des matériaux dont il est formé. Quant à la charge verticale, il y a à considérer la stabilité compressive des diverses assises horizontales du mur par rapport à leurs sections transversales. Tantôt c’est l’assise inférieure qui a à supporter proportionnellement la plus forte charge; tantôt c’est une assise plus élevée qui supporte cette charge, quand par exemple le mur contient des baies de portes, de fenêtres, etc.
La résistance d’un mur à la charge qu’il porte dépend des matériaux principaux dont il est construit, de la bonne liaison ou appareil des pierres naturelles ou artificielles dont il est formé, et enfin du mortier destiné à faire de cette agglomération de substances un tout compact. Il est très rare que l’épaisseur d’un mur soit déterminée par sa seule stabilité, parce que généralement d’autres exigences commandent une épaisseur plus forte et autre que celle requise par la stabilité naturelle, tandis que les dimensions des piliers isolés, qui ne sont assujettis qu’à une pression verticale peuvent facilement se déterminer. Nous ferons remarquer que ces piliers ne doivent avoir qu’une hauteur proportionnelle à leur superficie horizontale pour les empêcher de se rompre.
Dans aucune construction on ne rencontre de piliers en pierre qui aient au delà de onze fois leur épaisseur pour élévation. Les murs qui sont montés à une hauteur plus considérable que onze fois leur épaisseur doivent être retenus dans leur à-plomb ou position normale par des chaînes et des annexes.
On calcule aussi l’épaisseur des murs d’après la résistance qu’ils doivent offrir à la pression oblique effectuée par le vent et les ouragans, la poussée des voûtes ou celle d’autres parties de la construction, telles que poutres, solives, etc. Quant aux murs isolés ou piliers, ils sont regardés comme solides quand ils ont pour épaisseur de 1/6 à 1/8 de leur élévation, d’une solidité moyenne quand ils ont 1/10 d’épaisseur de leur hauteur, et enfin d’une solidité douteuse s’ils n’ont qu’un douzième de leur élévation pour épaisseur.
Pour connaître l’épaisseur à donner à un mur, il n’y a donc qu’à diviser sa hauteur par 1/6, 1/8, 1/10, suivant le plus ou moins de stabilité qu’on veut lui donner.
Indépendamment de l’élévation des murs et de son rapport à l’épaisseur, la longueur des murs isolés influe aussi sur l’épaisseur qu’on doit leur donner. Un mur d’une longueur considérable, par exemple, est sujet à des oscillations pendant de fortes tempêtes, et ces oscillations longtemps continuées compromettent l’aplomb des murs Quand leur longueur est infiniment plus considérable que leur élévation, il est d’usage de les renforcer par leur épaisseur elle-même, ou par des piliers ou des contreforts élevés à des distances égales les uns des autres. Si les matériaux sont rares et par conséquent coûteux, il faudra employer le dernier moyen pour la consolidation des murs isolés ou d’enceinte. Ceci s’applique non seulement aux murs de clôture ou autres murs isolés, mais encore à des murs de pourtour ou de face qui ne sont point reliés et consolidés par des murs transversaux ou de refend, ou maintenus dans leur aplomb par des couvertures ou charpentes sans poussée. Ordinairement les murs des bâtiments sont consolidés et reliés entre eux par des murs transversaux ou de refend et ces derniers contribuent puissamment à la stabilité des murs de pourtour.
L’épaisseur des murs peut encore être modifiée par la dimension des matériaux. Des murs en brique, par exemple, peuvent être construits en une demi, ou en une brique entière, en une brique et demie et en deux briques. On peut élever des murs en pierres de taille de toutes épaisseurs, tandis qu’on ne donne qu’une épaisseur déterminée aux murs en moellons, qui ne dépasse guère 0m,48 à 0m,50, à cause des parpaings qu’ils nécessitent, et qui dans leur longueur ne dépassent pas ces mesures ordinairement. Quant aux murs en pisé, on doit leur donner une épaisseur de 0m,35 et mieux encore de 0m,48, lorsque le pisé est à la chaux. Dans le cas où le pisé serait à la chaux hydraulique, comme on le pratique dans quelques parties de l’Allemagne, on peut ne donner à ces murs que 0m,15 à 0m,17 d’épaisseur.
Les murs en pisé de terre argileuse ne doivent être élevés qu’à une hauteur de 5 à 6 mètres, les murs en pisé à chaux ne doivent avoir que deux étages. Les murs en briques et en pierres peuvent être montés à des hauteurs indéterminées quand on leur donne une épaisseur en rapport avec leur élévation.
Il résulte d’une infinité d’observations faites par l’architecte Rondelet et consignées dans son grand ouvrage intitulé : Traité théorique et pratique de l’art de bâtir, qu’on peut se servir des calculs suivants pour déterminer les épaisseurs à donner aux murs.
Supposez que le rectangle ABCD (fig. 43) soit la face d’un des grands murs qui doivent renfermer l’espace rectangulaire EFGH. Tirez la diagonale BD et portez dessus de B en d la huitième partie de la hauteur AB si l’on veut lui donner beaucoup de solidité, la neuvième ou dixième partie pour une solidité moyenne, et la onzième ou douzième pour une construction légère. Si par le point d on mène une parallèle à AB, l’intervalle compris entre cette parallèle et la ligne AB indiquera l’épaisseur à donner aux grands murs EF, GH dont la longueur est égale à AD.
On aura l’épaisseur des murs EG, FH, en portant leur longueur de A en D′, et, après avoir tiré la diagonale BD′, on opérera comme pour les premiers.
On peut encore déterminer par le calcul l’épaisseur des murs que nous avons trouvée géométriquement. Faites une figure en proportion comme pour les exemples précédents et une simple règle de trois. La figure étant faite sur une échelle assez grande pour indiquer les centimètres, on mesurera avec cette échelle la longueur de la diagonale; connaissant par ce moyen les trois côtés du triangle ABD semblable au petit triangle Bed, on aura BD est à Bd comme AD est à ed. Exemple:
Supposons que la longueur du mur désigné par AD soit de 20 mètres et sa hauteur AB de 10 mètres, on trouvera la longueur de la diagonale de 22m,50; en prenant la neuvième partie de la hauteur AB, ou 1m,11 pour l’épaisseur à porter sur la diagonale de B en d, on dira: si 22m,50 donnent 1m,11, combien donneront 20 mètres, et on trouvera pour la valeur de ed 1 mètre.
Autre exemple: supposons la longueur du mur AD de 9m,09 et sa hauteur 3m,89, on trouvera la longueur de la diagonale de 9m,90; en prenant la neuvième partie de la hauteur, ou 0m,43 pour l’épaisseur à porter sur la diagonale, on dira:
9m,90: 9m,09:: 43: x, et l’on trouvera 0m,39.
Cependant, nous le répétons, comme dans la composition des édifices et des maisons les murs se combinent les uns avec les autres, il en résulte qu’avec une moindre épaisseur que celle trouvée par la règle précédente ils peuvent quelquefois avoir une stabilité suffisante.
Il est facile de concevoir aussi que la résistance d’un mur placé entre deux autres murs sera d’autant plus grande que ces deux murs seront plus près l’un de l’autre; de manière que dans un rapprochement extrême le déchirement serait impossible, et que dans un grand éloignement la partie du milieu ne résisterait guère plus qu’un mur isolé.
Les murs qui renferment un espace sont dans le cas du mur précédent, parce qu’ils se soutiennent mutuellement par leurs extrémités: ainsi leur épaisseur doit augmenter en raison de leur longueur.
Dans les maisons ordinaires, où la hauteur des planchers ne dépasse pas 3m,90 à 4m,90, pour trouver l’épaisseur des murs intérieurs ou de refend, il ne faut avoir égard qu’à la largeur de l’espace qu’ils divisent et au nombre de planchers qu’ils ont à soutenir. Quant aux murs de face, qui sont isolés d’un côté dans toute leur hauteur, il faut avoir égard à l’épaisseur du bâtiment et à son élévation. Ainsi un corps de logis simple exige des murs de face plus épais qu’un corps de logis double de même genre et de même hauteur, parce que leur stabilité est en raison inverse de leur largeur.
POIDS DU MÈTRE CUBE DES PRINCIPAUX MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION
(A titre de comparaison le mètre cube d’eau pèse 1000 kilogs.)
Pour les bois se reporter au tableau de la page 77.