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IX

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Table des matières

Une fois au lit, Efim fut tenté d’une mauvaise pensée:

— On n’a point volé son argent au pèlerin, pensait-il; je crois qu’il n’en avait pas. Il ne donnait nulle part. Il me disait bien de donner, mais lui-même ne donnait rien. Il m’a même emprunté un rouble.

Ainsi pensait Efim. Puis il se fit des reproches:

— Pourquoi porter des jugements téméraires sur un homme? C’est un péché que je ne veux plus commettre.

Mais, dès qu’il s’assoupissait, il se rappelait de nouveau que le pèlerin regardait l’argent d’un certain air sournois, et combien il paraissait peu sincère en disant qu’on l’avait volé.

— Il n’avait pas d’argent sur lui: c’est une invention. Le lendemain, levés de bonne heure, ils se rendirent à l’office du matin, dans le grand temple de la Résurrection, au Saint-Sépulcre. Le pèlerin ne lâchait pas Efim et le suivait partout.

Il y avait au temple quantité de pèlerins, et des Russes, et des Grecs, et des Arméniens, et des Turcs, et des Syriens, à ne pouvoir les dénombrer. Efim parvint avec la foule jusqu’à la Sainte-Porte, et passa à travers la garde turque, à l’endroit où le Christ fut descendu de la croix, où on l’oignit d’huile; là, brûlaient neuf grands chandeliers. Efim y déposa son cierge. Puis le pèlerin le mena à droite, en haut, par l’escalier, sur le Golgotha, là où fut la croix. Efim y fit sa prière; puis on lui montra la fissure qui déchira la terre jusqu’à l’enfer. On lui montra ensuite l’endroit où furent cloués à la croix les mains et les pieds du Christ, puis le sépulcre d’Adam, dont les os furent humectés par le sang du Christ. Puis, ce fut la pierre où s’assit le Christ quand on mit sur Lui la couronne d’épines, et le poteau auquel on lia le Christ pour Le flageller, et les deux creux laissés dans le roc par les genoux du Christ. Efim eût vu d’autres choses encore, mais il se fit une poussée dans la foule: tous se hâtaient vers la grotte du Saint-Sépulcre. À une messe non orthodoxe un office orthodoxe allait succéder. Efim suivit la foule à la Grotte.

Il voulait se défaire du pèlerin, contre lequel il péchait toujours en pensée; mais l’autre s’attachait à lui, et le suivit à l’office de la Grotte du Saint-Sépulcre. Il eût voulu se mettre plus près, mais ils étaient venus trop tard. La presse était si forte qu’on ne pouvait ni avancer ni reculer. Efim resta donc sur place, regardant devant lui et faisant ses prières. Par moments, il tâtait s’il avait encore son porte-monnaie. Et ses pensées se succédaient:

— Le pèlerin me trompe assurément… Si pourtant il ne m’avait pas trompé, si on lui avait en effet volé son porte-monnaie!… Mais alors, pourvu que pareille chose ne m’arrive pas aussi!

Tous les Contes de Léon Tolstoi (151 Contes, fables et nouvelles)

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