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L’accusation qui subsista pendant longtemps encore, sous le nom d’accusation par partie formée, paraît être devenue déjà assez rare. Nous en avons cependant quelques exemples. Vers 1274, un ancien prévôt des Fossés est accusé de rapt devant l’abbé de Saint-Maur, «Thomas Carnifex, quondam

» prepositus Fossatensis, accusatus fuit de rato, coram abbate

» dicti loci.» En 1272, un juif est accusé d’un vol devant les juges de Saint-Germain, «fu accusez 1 juif qui avoit emblé

» autrui vin». En 1332, à Saint-Martin, un individu qui en accuse un autre de vol et de meurtre, est amené devant les juges de Saint-Martin, en état d’arrestation en même temps que l’accusé, «amené par lesdictes gens dudit prevost, ledit

» Jehannin, fuilz dudit Sallemon, accusant du prisonnier». De même, en 1338, on arrête, à Saint-Martin, une femme qui accusait un individu d’avoir fabriqué une fausse quittance à la Cour de l’Official. Ce ne sont pas, sans doute, les seuls cas dans lesquels une accusation formelle ait été portée; et il est à supposer que cette procédure a été suivie encore dans quelques-unes des nombreuses affaires dont nos registres nous font connaître seulement le résultat. Mais ce mode de poursuite devait être néanmoins peu usité. L’accusation n exposait plus, sans doute, l’accusateur téméraire à la peine du talion (qui ne fut peut-être d’aillleurs jamais rigoureusement appliquée), mais elle le soumettait néanmoins à une peine, et elle l’astreignait, dans tous les cas, à l’obligation de subir la détention préventive, pendant le procès, comme l’accusé . On comprend dès lors que cette voie périlleuse ait été délaissée dès que le juge consentit à substituer son action à celle de la partie .

Dans la plupart des affaires rapportées dans nos registres, l’arrestation est évidemment opérée sur la rumeur publique, sur les indices recueillis par le juge ou sur la dénonciation de la partie . Une notice de Saint-Maur, de 1274, qui relate l’arrestation des auteurs d’un homicide, marque très clairement cette action d’office du juge: «Et nullo homine sequente, nulloque contra ipsos clamante, satisque post cognito facto et scito, a pluribus de villa capti fuerunt.» Toutefois, si l’action directe des intéressés n’est plus nécessaire pour engager les poursuites, ils n’en jouent pas moins un rôle important dans la procédure. Le juge provoque souvent leur intervention, en retenant le délinquant pendant un certain délai après lequel il est mis en liberté si personne ne se présente pour le convaincre. Guiot le meunier, soupçonné d’avoir commis un viol à Saint-Maur en 1268, est mis en liberté, après avoir été détenu pendant plus de quarante jours, «por ce que nul ne se trest avant ne démonstra qui rien li demandast ni le volsist porsivre» . En 1296, dans une affaire de meurtre, jugée à Sainte-Geneviève. on interpelle le neveu, le cousin et le clerc de la victime, avant de procéder à la délivrance du prisonnier, «et leur fu demandé, en jugement, se il vouloient riens demander audit Guillaume et à sa fame; et il respondirent que non, et requéroient que il feussent délivrez» . On appelle les parties, leurs parents, leurs amis, tous ceux en un mot qui ont intérêt à la punition du crime. En 1299, la femme d’un meurtrier arrêtée à Sainte-Geneviève après la fuite de celui-ci est délivrée, «par droit fesant, apelez premièrement les amis du mort, à savoir mon se il li en vouloient riens demander».

La mise en liberté de l’accusé était souvent subordonnée à la production de plèges, ou cautions, qui garantissaient sa représentation en justice, mais elle était, sous cette forme, assez largement pratiquée . Dans l’affaire de Saint-Maur, de 1268, que nons venons de rappeler, la libération du prisonnier n’est accordée que sur la présentation de dix cautions qui prennent, corps pour corps, l’engagement de le ramener s’il était de nouveau appelé en justice . La première notice de Sainte-Geneviève rapporte l’intervention du même nombre de cautions pour la délivrance d’un individu accusé de meurtre: «Anno domini m° cc° septuagesimo primo, die sabbati, in festo sancti Arnulphi, recredivimus Johannem deSancto Martino in hune modum quod, in qualibet assisia, coramnobisse presentabit, recepturus et facturus quod jus dictaret super facto quod ei imponebatur de murtro facto, in terra nostra, de nutrice Guillermi Scoti, carnificis, interfecta. Usque ad annum. Hungerus tabernarius, Bertrandus le lorrain, Stephanus de Moureto, Radulphus Nigno, Conrraduscarnifex, Renaudus carnifex, Petrus Huberti, Johannes Rufus, Guillelmus Herbelin, sunt plegii quilibet, cors pour cors et avoir pour avoir.» Dans une affaire de moindre importance, à Saint-Martin, en 1334, quatre cautions se constituent «pièges et principaux rendeurs, corps pour corps, avoir pour avoir, tous ensemble et chacun d’eux pour soi et pour le tout» .

Malgré la rigueur de la formule de leur engagement les plèges ne répondaient pas habituellement, sur leur corps, de la représentation du prisonnier. Ils n’encouraient, selon Beaumanoir, aucune peine corporelle; ils étaient soumis seulement à une peine pécuniaire arbitraire qui pouvait aller jusqu’à la perle de tout leur bien .

La durée de l’engagement était parfois limitée à l’avance; mais elle était le plus souvent indéterminée. Nous voyons, à Sainte-Geneviève, des plèges poursuivis après sept ans écoulés. Ils avaient cautionné, en 1291, trois accusés de vol, et c’est seulement en 1298, qu’après avoir été sans doute mis en demeure de représenter les accusés, ils furent obligés de reconnaître leur plévine en jugement et de s’en mettre en la merci de l’église. Ils furent condamnés à payer une somme de deux cents livres; mais ils reçurent, à titre d’indemnité, les biens des accusés.

Nous ne trouvons, dans nos Registres, aucune mention de cautions assujetties à l’emprisonnement; mais un des cartulaires du chapitre de Notre-Dame nous en fournit un exemple remarquable . Nous y voyons un piège détenu, et une double plègerie. Le piège, détenu pour la non-représentation del’accusé qu’il avait cautionné, sollicite, à son tour, sa mise en liberté ; et elle ne lui est accordée que sur l’engagement pris par de nouvelles cautions, dans les mêmes termes, d’assurer sa propre représentation dans un délai fixe qui lui est imparti pour rechercher et ramener l’accusé : «Anno domini cc° octogesimo quinto, die sabbati post festum beati Dyonisii, Adam Bridon de Orentis detentus in prisione Capituli Parisiensis, Parisius, occasione Evrardi Boucheron pro quo se constituerai plegium, corpus pro corpore, quod non exiret prisionem capituli de Roseto, [promisit] quod procurabit, pro posse suo, tactis sacrosanctis evangeliis, quod dictum Evrardum adducet Parisius, ad prisionem capituli, infra instans festum Omnium Sanctorum; et de hoc, Gilo Groignart, Jacobus Régis de Bertout, Stephanus Alutarius de Brueil, Gilo major de Ormellis se fecerunt plegios apud Rosetum, et Petrus Banteline, Wulipicius de Vervila, Petrus de Bertout se fecerunt plegios, tactis sacrosanctis evangeliis, in capitulo, quod nisi dictus Adam se reponat in prisionem capituli infra instans festum Omnium Sanctorum, quod ipsi extunc se ponent, Parisius, in prisionem Capituli, in statu in quo erat dictus Adam.»

Une procédure spéciale de contumace était suivie à l’égard des accusés en fuite. On les appelait en justice, par quatre quatorzaines, après lesquelles on prononçait contre eux une sentence de bannissement qui entraînait la confiscation de leurs biens. Trois meurtriers en fuite sont appelés, à Sainte-Geneviève en 1390, par trois quatorzaines ensuivant et, à la quarte, bannis sur la hart. De même, à Saint-Germain, en 1306, un autre meurtrier est banni, après avoir été appelé par trois quatorzaines et la quarte d’abundant; ses biens meubles et non meubles sont saisis, et la sentence de bannissement est publiée par un sergent de l’abbaye, à Issy et dans le bourg Saint-Germain. Plusieurs notices indiquent exactement les jours correspondants aux quatre appels successifs du contumax. Le Grand Coutumier donne les formules mêmes de cette procédure, comme celle qui était suivie au Châtelet de Paris. La sentence de bannissement était publiée solennellement dans toute l’étendue de la seigneurie. Défense était faite à tous les habitants de recéler le banni, de lui venir en aide en aucune manière, et même de lui donner à boire ou à manger; tous étaient, au contraire, tenus, s’il était rencontré hors d’un lieu saint, de se saisir de sa personne, à assemblée, et cri et à son de cloches, et de l’amener devant la justice pour y subir la peine réservée au fait dont il s’était rendu coupable .

Histoire des justices des anciennes églises et communautés monastiques de Paris

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