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III

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La grandeur de Cobden, c’est d’avoir compris tout de suite qu’il ne s’attaquait pas à une loi, mais au corps le plus puissant qui ait jamais peut-être existé dans le monde, l’aristocratie anglaise, et de n’avoir point reculé devant cette lutte.

En 1839, déjà la bataille commence, la ligue a formé son conseil exécutif; on y trouve les noms du jeune fabricant d’amidon Wilson, à qui l’Angleterre confiera plus tard le soin de rétablir les finances de son empire de l’Inde, et qui mourra victime de son zèle et de son dévouement au moment de terminer cette grande et laborieuse tâche; du quaker Bright, aussi jeune que lui et destiné à devenir le chef d’un parti imprudent parfois, mais toujours sincère et obéissant à de généreuses inspirations; de Gibson, aujourd’hui l’un des membres importants du Parlement; du colonel Thompson, l’ouvrier de la première heure, de Fox, de Villiers, de Smith, de Paulton, d’Ashworth, de Prentice, le rédacteur du Manchester-Times. Hickin remplit l’office de secrétaire du conseil, Rawson celui de trésorier; Bickham et Walley acceptent la mission de répondre aux huit cent mille lettres par an que reçoit le comité ; M. Lees se réserve les soins de l’administration. Le chef reconnu de cet état-major est Cobden, qui trouve moyen de se multiplier, d’être partout à la fois, et de vivre à un meeting par jour. Dans deux mois, on calcule qu’il assiste à plus de quarante meetings.

Réduits à leurs propres forces, les membres du Comité de la ligue auraient succombé sous leur fardeau. Heureusement le génie du progrès moderne vient leur fournir de puissants auxiliaires. La vapeur permet aux orateurs du libre-échange de se transporter partout avec une rapidité foudroyante; l’agitation fait vingt lieues par heure. Le soir elle est à Liverpool, le matin à Edimbourg; le chemin de fer la sème sur tous les points du territoire. Grâces à la réforme postale, la ligue peut subvenir aux frais de sa prodigieuse correspondance; enfin la Réforme électorale ouvre à la Réforme commerciale les portes du Parlement, et introduit l’agitation dans le grand foyer politique, au sein même de la chambre des Communes.

Ce grand mouvement qui remue les Trois-Royaumes, part de Free trade Hall, ce Vatican du libre-échange construit en six semaines à Manchester. Pénétrons un moment dans la ruche, et voyons les ouvriers à l’œuvre. Dans la salle du conseil on apporte les lettres, on les ouvre, on les classe; toutes sont lues soigneusement, et la réponse ne se fait pas attendre; dans l’étage au-dessous est l’imprimerie; pendant que des centaines d’ouvriers composent les livres, les circulaires, les petits pamphlets (tracts), les instructions de la ligue, les presses les tirent à des milliers et des milliers d’exemplaires. Le libre-échange a recours à tous les moyens de publication, il pénètre dans les familles sous toutes les formes, même sous celle d’abécédaire. Les opérations du pliage, du brochage de ces innombrables imprimés s’accomplissent dans diverses pièces; voici la salle ou, formés en ballots entassés, ils attendent le moment du départ. Tout est public, tout est ouvert au voyageur qu’on accueille avec la plus gracieuse hospitalité, et qui trouvera de charmantes ladies empressées à lui offrir du thé ou des rafraîchissements avant de quitter Free trade Hall.

Que la présence des femmes dans un pareil lieu ne fasse point sourire nos compatriotes; elles n’y sont point déplacées. Il s’agit de secourir les pauvres, de vêtir ceux qui ont froid, de nourrir ceux qui ont faim, d’empêcher les petits enfants de mourir de misère, les jeunes filles de se prostituer, comment les femmes ne seraient-elles pas libres-échangistes?

Les célébrités du jour : 1860-61

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