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Nous n’avons pas assez la passion des grands coups d’épée pour raconter et admirer un à un tous ceux que porta Victor-Emmanuel. Ce n’est pas la vie du soldat, c’est celle du premier citoyen de l’Italie que nous racontons, et le vif éclat des batailles éclaire mal ces grandes physionomies.

Le trait distinctif de ce caractère est celui que le peuple, un excellent juge! a saisi le jour où il a donné à Victor-Emmanuel le surnom de Roi Galant-Homme. La loyauté de Victor-Emmanuel est à toute épreuve, et cette loyauté s’allie à une finesse de vues, à une perspicacité remarquables. Nous n’en voulons citer qu’un trait. Lorsque Santa Rosa, ministre du commerce et de l’agriculture, mourut, M. Galvagno proposa au Roi de donner ce portefeuille à M, le comte de Cavour. Le Roi se fit prier, et comme M. Galvagno insistait: «Comment ne vous apercevêz-vous pas, lui dit-il, que cet homme finira par vous supplanter tous?»

Au début de son règne, il fut très vivement sollicité de briser le statut sarde que, lors de son avénement au trône, il avait juré de maintenir. Un État constitutionnel ferait tache en Italie; c’était un funeste exemple pour les autres peuples, et l’Autriche n’épargnait rien pour décider le Roi à abandonner cette voie déplorable, à se rattacher aux anciennes dynasties absolues, à faire cause commune avec les monarchies de droit divin. Un coup d’État, c’est sitôt fait! Victor-Emmanuel résista à toutes les sollicitations: J’ai juré, je tiendrai! répondait-il invariablement. Et il avait d’autant plus de mérite en cela qu’il comprenait peu le mécanisme savant et compliqué du régime constitutionnel. Nous n’en voudrions pour preuve que la singulière proclamation par laquelle le Roi Victor-Emmanuel intervenant, au mépris de la sage fiction parlementaire, dans l’arène électorale, demanda aux électeurs de lui envoyer une Chambre qui secondât sa politique. Ce curieux document mérite d’être cité, l’homme s’y révèle tout entier.

«Dans la gravité des circonstances actuelles, la loyauté que je crois avoir

» montrée jusqu’à présent dans mes paroles et dans mes actes, devrait peut-être

» suffire à éloigner des esprits toute incertitude. J’éprouve néanmoins, non pas la

» nécessité, mais le désir d’adresser à mes peuplés des paroles qui soient un

» nouveau gage de sincérité, en même temps qu’une expression de justice et de

» vérité.

» Par la dissolution de la Chambre des députés, les libertés du pays ne courent

» aucun risque. Confiées à l’honneur de la Maison de Savoie, elles sont protégées

» par la vénérable mémoire de Charles-Albert, mon père, et par la religion de

» mes serments. Qui oserait craindre pour elles?

» Avant de réunir le Parlement, j’adressai à la nation et principalement aux

» électeurs des paroles franches. Dans mes proclamations du 3 juillet 1849, je les

» avertissais d’agir de manière à ne pas rendre le statut impossible. Néanmoins, il

» n’y a eu qu’un peu plus du tiers des électeurs qui ait concouru aux élections;

» les autres ont négligé ce droit qui est, en même temps, le strict devoir de

» chacun dans un État libre. J’avais rempli mon devoir; pourquoi n’ont-ils pas

» rempli le leur?

» Dans le discours de la couronne je faisais connaître, et ce n’était que trop

» nécessaire, les tristes conditions de l’État. Je montrais la nécessité de mettre

» une trêve à toute passion de parti et de résoudre promptement les questions

» vitales qui rendraient douteuse la chose publique. Mes paroles étaient dictées

» par un profond amour de la patrie et par une loyauté sans tache. Quel fruit

» ont-elles produit? Les premiers actes de la Chambre furent hostiles à la Couronne

» . La Chambre usa de son droit..... J’ai juré de maintenir la justice, la

» liberté, le droit pour chacun. J’ai promis de sauver la nation de la tyrannie des

» partis, quels que soient le nom, le but, la position des hommes. Ces principes,

» ces serments, je les ai remplis par la dissolution d’une Chambre devenue

» impossible. Je les ai remplis en en convoquant une autre. Mais si le pays, si les

» électeurs me refusent leur concours, ce n’est plus sur moi que retombera la

» responsabilité de l’avenir et des désordres qui en pourraient résulter. Ce ne

» sera pas de moi qu’ils auront à se plaindre, ce sera d’eux-mêmes.»

Ce ferme langage, en dehors des usages constitutionnels, frappa vivement les électeurs qui répondirent à un si loyal appel.

Les célébrités du jour : 1860-61

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