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XI

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Piotr Nikolaievitch Sventitzky faisait tout son possible pour trouver le voleur. Sans la complicité de quelqu’un de la maison, le coup n’aurait pu se faire. Alors il commença à soupçonner son personnel, et se mit à interroger les domestiques pour savoir qui, cette nuit-là, avait découché. Il apprit que Prochka Nikolaieff n’avait pas couché à la maison. Prochka était un jeune garçon, récemment libéré du service militaire, un beau soldat, habile, que Piotr Nikolaievitch avait gagé pour être cocher.

L’inspecteur de police était un ami de Piotr Nikolaievitch, et celui-ci connaissait également le chef de police du district, le maréchal de la noblesse et le juge d’instruction. Tous ces personnages venaient chez lui le jour de sa fête et connaissaient bien ses bonnes liqueurs et ses champignons marinés. Tous s’intéressaient à son histoire et tâchaient de l’aider.

— Voilà, vous défendez les paysans, disait l’inspecteur de police. Croyez-moi: ils sont pires que les bêtes. Sans le fouet et le bâton on n’en peut rien faire… Alors, vous dites, Prochka… Celui que vous employez comme cocher?

— Oui, lui.

— Faites-le appeler.

On appela Prochka et son interrogatoire commença:

— Où étais-tu?

Prochka secoua ses cheveux et une flamme parut dans ses yeux.

— À la maison.

— Comment à la maison! Tous les domestiques disent que tu as découché.

— C’est comme vous voulez.

— Mais il ne s’agit pas de vouloir. Voyons, où étais-tu?

— À la maison.

— C’est bien. Agent! Mène-le au poste.

— C’est comme vous voulez.

Et Prochka n’avoua pas où il était parce qu’il avait passé la nuit chez son amie Parasha, laquelle lui avait fait promettre de ne pas la trahir. Et il ne la trahit point. Il n’y avait pas de preuves, on le relâcha. Mais Piotr Nikolaievitch demeurait convaincu que tout cela était son œuvre. Et il ressentit de la haine pour lui.

Prochka, comme c’était son habitude, prit à l’auberge deux mesures d’avoine, donna aux chevaux une mesure et demie, puis vendit l’autre demi-mesure et dépensa l’argent à boire. Piotr Nikolaievitch ayant appris cela, déposa une plainte au juge de paix.

Le juge de paix condamna Prochka à trois mois de prison. Prochka était orgueilleux. Il se croyait supérieur aux autres, et était fier de sa personne. La prison l’humilia. Il ne pouvait plus s’enorgueillir devant les gens, et, d’un coup, se laissa aller. Au sortir de la prison, Prochka retourna chez lui moins irrité contre Piotr Nikolaievitch que contre tout le monde.

Prochka, après la prison, au dire de tous, se laissa aller et devint paresseux, se mit à boire; enfin, peu après, il fut pris volant des habits, chez une femme. Et de nouveau, il fut jeté en prison. Pour ce qui était de ses chevaux, Piotr Nikolaievitch apprit seulement qu’on avait retrouvé la peau du hongre, et cette impunité des coupables l’agaçait de plus en plus. Maintenant il ne pouvait plus voir sans colère les paysans, ni même parler d’eux; et chaque fois qu’il le pouvait, il ne manquait pas de leur nuire.

Tous les Contes de Léon Tolstoi (151 Contes, fables et nouvelles)

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