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ОглавлениеLe R. P. Gratry, malgré son double titre de prêtre de l’Oratoire et de professeur de théologie morale à la Sorbonne, doit être rangé ici plutôt au nombre des philosophes qui préparent les esprits à recevoir les démonstrations de la divinité de Jésus-Christ, qu’au nombre des théologiens qui l’établissent par la double autorité de l’histoire et de la tradition. Tel est évidemment là le caractère qu’il a voulu donner à son dernier ouvrage: Les Sophistes et la Critique.
M. Caro expose les idées que professent les systèmes antichrétiens; le R. P. Gratry remonte à l’origine des méthodes qui ont enfanté ces étranges idées. M. Caro est l’historien critique de nos erreurs contemporaines; le R. P. Gratry n’en prend que la dernière métaphysique et réduit le tout à une question de principes.
Il faut louer, avant tout, l’admirable idée morale qui a servi de point de départ au travail et à la polémique du R. P. Gratry. La voici réduite à ses termes les plus simples.
Lorsqu’on voit des esprits cultivés, des intelligences d’une certaine force, se laisser entraîner par les erreurs les plus incroyables qu’il soit donné à la nature humaine d’imaginer, on hésite entre deux impressions entre lesquelles il faut cependant choisir.
Il faut, ou leur imputer une inébranlable impudence lorsqu’on les voit démentir avec tant d’audace les principes les plus élémentaires du sens commun, ou se demander s’il ne s’exerce pas sur ces esprits quelque fascination secrète qui les entraîne et les égare malgré eux. On ne s’avise guère de rompre en visière à tout le genre humain, à moins d’être entièrement aveuglé par la sottise, ou secrètement soutenu par quelque faux raisonnement.
Cette dernière hypothèse est la vraie.
Depuis Hégel, il y a toute une catégorie d’esprits qui ont reçu et qui gardent pour ainsi dire en eux le germe de l’erreur. L’ancienne secte des sophistes a relevé la tête; elle a reparu parmi nous: elle y enseigne publiquement une nouvelle métaphysique.
Gorgias et Polus, au temps de Platon et de Socrate, s’efforçaient de prouver, tantôt que tout est vrai et tantôt que tout est faux. Ces deux thèses opposées, ces deux moitiés de l’école sophistique venaient se rencontrer dans cette affirmation commune qu’il n’y a plus ni erreur ni vérité, et que tout peut être indifféremment affirmé ou contredit.
Une certaine école renouvelle parmi nous des doctrines semblables. Seulement elle les appuie sur des principes différents, en même temps qu’elle y arrive par une autre voie.
Je donnerai à cette école, non pas le nom que lui inflige la juste indignation du P. Gratry, mais celui qu’elle s’attribue à elle-même non sans un certain orgueil, je l’appellerai l’école critique.
Voici le raisonnement qui lui sert de point de départ.