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XXIII

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Frantz Mathéus suivit les conseils de Coucou Peter, s’arrêtant aux différentes auberges qu’il lui avait indiquées sur sa route et payant son écot, comme il convient à un homme qui ne voyage plus dans l’intérêt de la civilisation.

Il passa par Wasselonne, Marmoutier, Saverne, et le lendemain il atteignait le plateau du Falberg, qui s’incline vers le Graufthal.

C’est au petit jour que maître Frantz descendit la montagne; le coq rouge de Christina Bauer faisait entendre son cri matinal, et le bonhomme, à cette voix bien connue, pleurait de joie.

Bruno marchait au petit pas et hennissait tout doucement comme pour dire: «Monsieur le docteur, voici notre hameau; reconnaissez-vous ces petits sentiers, ces hautes bruyères, ces grands arbres? et là-bas... ces toits de chaume noyés dans la brume du vallon, c’est notre hameau! Ah! monsieur le docteur, que je suis content de le revoir!»

Et le bon docteur Mathéus sanglotait: il avait mis la bride sur le cou de son cheval et se couvrait le visage des deux mains, ne pouvant retenir ses larmes... puis il les ôtait et regardait en silence.

Le jour grisâtre, les vapeurs blanches, les rochers couverts de mousse, les arbustes, l’odeur des plantes, la brise, tout parlait à son âme, et plus il approchait, plus il admirait ce pays. Chaque chose lui paraissait belle comme s’il l’eût vue pour la première fois; aimable, comme s’il eût passé mille existences avec elle.

«Mon Dieu! disait-il, mon Dieu! que vous êtes bon de me laisser revoir mon pays... mon cher pays! Mon Dieu, je ne savais pas, en vérité, je ne savais pas combien j’aimais ce pays; combien ces arbres, ces maisonnettes, cette jolie Zinsel qui murmure, ces grands sapins qui se balancent, je ne savais pas combien tout cela était nécessaire à ma vie... non, je ne le savais pas!»

Et le petit sentier s’élargissait, il se tournait et se retournait comme pour lui montrer tout le charme du paysage et le conduire doucement à sa demeure.

Au bout d’une heure il aboutit dans le grand chemin sablonneux près du pont de bois, à l’entrée du hameau. Les pas de Bruno retentirent sur le pont, et l’excellente bête hennit d’un ton plus vif.

Tout dormait encore au Graufthal; le coq rouge de Christina Bauer redoublait seul ses coquericos; Mathéus regardait les petites fenêtres, les larges toitures pendantes, les lucarnes bouchées avec de la paille, les soupiraux des caves. Quelle fraîcheur agréable sortait de la rivière! une vie nouvelle circulait déjà dans les membres du bonhomme.

Enfin, le voilà devant sa porte...

Il met pied à terre, il jette un regard par-dessus la palissade de son petit jardin, et voit la rosée qui perle sur de magnifiques têtes de choux.

Que tout est frais, calme, silencieux!

Il frappe au volet... il attend... Bruno hennit... que va-t-il arriver?—Il écoute... on traverse la chambre... on lève le crochet... Comme le cœur de maître Frantz galope!—On pousse le contrevent... et Martha... la bonne vieille Martha, en cornette de nuit, se penche au dehors.

«Dieu du ciel! c’est monsieur le docteur! Ah! mon Dieu! est-ce possible?»

Et vite, bien vite, la bonne femme s’empresse d’aller ouvrir la porte.

Mathéus, assis sur le banc de sa maisonnette, pleurait comme l’Enfant prodigue!

FIN DE L’ILLUSTRE DOCTEUR MATHÉUS.

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