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CHAPITRE IX.

Table des matières

LA HOLLANDE ET LA CAMPAGNE D’HIVER.

( Suite de nivôse. Janvier 1793. )

TANDIS que les soldats de Jourdan creusent sous la neige la tranchée devant Mayence, que leurs graves camarades resserrent le blocus de Luxembourg dont ils préparent le bombardement, que Pérignon reçoit les clefs de Rose, que les défenseurs de la Catalogue cherchent un dernier point d’appui sur la faible ligne de la Fluvia, et qu’enfin les Piémontais voient nos bataillons prêts à tomber sur eux du haut des Alpes, comme de redoutables avalanches, l’armée du nord marche au pas de charge sur la Hollande.

Cependant le stathouder a conçu un moment d’espoir. Le prince de Hesse-Cassel, arrivant de Maestricht où il a capitulé, lui a rapporté que dans l’armée française on montre des dispositions pacifiques pour la république hollandaise; que lui seul, comme stathouder, pourrait être un obstacle à tout arrangement. Aussitôt le stathouder a saisi cette ouverture. Les lignes protectrices de la Meuse et du Rhin étaient au moment de s’effacer sous la glace. Le danger devenait imminent; il fallait à tout prix gagner le temps du dégel, et le seul moyen était de négocier!.... Le stathouder se rend donc à l’assemblée des États Généraux; il leur communique l’avis qu’il a reçu; il ne veut pas qu’on se laisse arrêter par l’exclusion qui le menace personnellement; il déclare qu’il croit devoir sur-le-champ entrer en pourparlers, et MM. Brantzen de Gueldres, et Repelaër de Dordrecht, sont envoyés à Paris.

Mais le stathouder n’est pas le seul à savoir que l’incident des glaces peut mettre la Hollande à la merci des troupes républicaines. C’est Carnot qui dirige encore une fois le fil des opérations militaires, et par lui de tels a-propos ne sauraient être négligés. Les dispositions du comité de Paris ne sont donc plus les mêmes qu’à l’époque où le prince de Hesse-Cassel capitulait à Maestricht. Aussi, lorsque les envoyés du stathouder se présentent, la même main, qui les fait admettre dans le Comité, signe l’ordre aux troupes de la République de s’avancer jusqu’à Amsterdam. L’entreprise était hardie; un dégel inopiné pouvait changer le succès en désastre. Mais l’audace est la mère de la fortune!... Cependant Pichegru hésite; il se fait répéter l’ordre plusieurs fois. Ennuyés de ces délais, les représentans Roberjot, Alquier et Bellegarde, qui se trouvent en mission auprès de l’armée, le font appeler.

«Tiens, lui disent-ils, voici les derniers ordres

» du Comité ; si dans deux heures tu n’es pas

» en marche, tu es destitué !.»

Aussitôt le Vahal est franchi sur la glace. C’est le 7 nivôse ( 27 décembre ) que ce beau mouvement a commencé ; il se poursuit avec intrépidité. Le lendemain, 8 nivôse, on passe la Meuse sur la glace, comme on a passé le Vahal. L’armée anglo-batave croit se retirer derrière le Lech; mais le Lech a disparu. Nous arrivons et les alliés vont chercher l’Yssel qu’ils ne retrouvent pas davantage.

Le peuple de Paris subissait alors une cruelle disette, par suite des difficultés que la rigueur de la saison mettait dans l’arrivage des subsistances. Mais, à la nouvelle des succès de notre armée du nord, toutes les plaintes contre l’hiver

ont cessé. «Puisque ce grand froid nous

» livre la Hollande, dit gaiement Letourneur

» de la Manche à la tribune, il n’est pas de patriote

» qui ne se console d’avoir un peu soufflé

» dans ses doigts.»

Bientôt on apprend que nous occupons Utrecht. Le jour que nous y sommes entrés, le prince d’Orange a abandonné le stathoudérat, et n’a pris que le temps de se jeter dans une barque pour gagner l’Angleterre.

Enfin, dans la séance du 6 pluviôse, le dénouement est annoncé. «Nous sommes à Amsterdam,

» écrivent les représentans près l’armée du

» nord.» Aussitôt toute l’assemblée se lève, et les voûtes retentissent des cris de vive la République! On veut suspendre ce premier élan pour entendre le reste de la dépêche, et l’enthousiasme se comprime un moment. «Nous sommes

» à Amsterdam, reprend le rapporteur du

» Comité. Les Anglais se réfugient par Groningue

» dans leur électorat de Hanovre; toute la

» Hollande est au pouvoir de la République, et

» c’est par une charge de cavalerie sur la glace

» que nous nous sommes emparés de la flotte de

» Texel.»

A ce dernier trait, les acclamations redoublent et vont chercher des échos par toute l’Europe.

A voir ces témoignages d’admiration qui échappent à nos ennemis comme à nos amis, qui ne croirait que la République est au moment de recueillir le prix de la constance et du courage! Mais le tableau a son revers dans la situation intérieure de la France.

Manuscrit de l'an trois (1794-1795)

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