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CHAPITRE XI

Table des matières

L’AUTRICHE ET L’ANGLETERRE.

( Nivôse et janvier. )

LE Parlement britannique vient de se réunir, et la déclaration suivante a été jetée dans le discours du trône.

«Malgré les revers et les contrariétés que nous

» avons éprouvés dans la dernière campagne,

» nous conservons la conviction intime que nous

» devons poursuivre vigoureusement la guerre

» juste et nécessaire où nous sommes engagés...

» Aucun gouvernement établi, aucun état indépendant

» ne peut, dans la situation actuelle des

» choses, placer une confiance réelle dans les négociations.»

L’Autriche emploie à peu près le même langage dans les communications qu’elle est obligée d’avoir avec ses co-états de l’Empire., Mais les longs protocoles de Ratisbonne nous offrent moins d’éclaircissemens que quelques lignes des débats du Parlement anglais.

Dans la discussion qui est ouverte par le discours du trône, M. Canning émet le vœu que, tout en poursuivant la guerre avec vigueur, on n’en recherche pas moins le moyen d’arriver à la paix.

Fox est plus absolu dans son désir d’un accommodement: «Nos désastres sont tels qu’on n’en a

» jamais vu de pareils,» dit-il, et il récapitule les triomphes de la République en des termes qu’un Français sera toujours fier d’entendre. Voici sa conclusion: «Qu’on cherche une semblable campagne

» dans les annales de l’Europe! non! nous

» ne pouvons sortir trop tôt d’une guerre aussi ruineuse.

»

Un troisième avis est ouvert: «Puisqu’il n’est

» plus permis d’opérer la contre-révolution de

» France par les armes, dit M. Thornton, peut-

être» devrait-on chercher dans la paix les moyens

» d’obtenir le même résultat?»

Mais la haine de M. Pitt, et sa confiance en des menées secrètes lui font repousser toute espèce de transaction. «Il a plu, dit-il, à l’impénétrable

» Providence de donner l’avantage à la France

» partout où elle s’est montrée. Ne succombons

» pas du moins sans avoir déployé tous nos efforts.

» Pour moi, je ne veux abandonner le combat

» que quand mon excuse sera dans l’entière

» impuissance de le soutenir... L’Autriche est déterminée

» à poursuivre avec vigueur la campagne

» prochaine, pourvu que l’Angleterre l’aide de ses

» finances. Moyennant six millions sterling, l’empereur

» d’Allemagne s’engage à opposer deux

» cent quarante mille hommes à la République

» Française.»

Des subsides! s’écrie l’opposition, toujours des subsides! c’est un remède de dupes. L’année dernière, nous en donnions à la Prusse; à quoi cela a-t-il servi? La Prusse traite maintenant avec la France. Quelle meilleure garantie nous offre l’Autriche? Nous la paierons aujourd’hui; demain elle s’arrangera avec la République. —

«C’est parce que la Prusse nous quitte, réplique

» M. Pitt, qu’il faut rattacher l’Autriche encore

» plus fortement à notre cause. Si la Prusse nous

» manque de foi, devons-nous pour cela renoncer

» à faire des alliances? L’Autriche a une

» politique fixe; nul Cabinet n’est plus aguerri

» aux défaites et ne sait mieux s’en relever. Elle

» ne peut voir avec plaisir les Français maîtres

» de la Hollande. Elle ne se résignera jamais à

» leur abandonner les Pays-Bas, et il est impossible

» qu’elle leur permette de dominer sur le

» plus petit coin de l’Italie. Voilà nos garanties

» à l’égard de l’Autriche; et d’ailleurs nous ne

» la paierons que partiellement et à mesure

» qu’elle acquittera les obligations du traité. —

» Ces victoires qui vous découragent, continue

» M. Pitt, en s’adressant sans doute à ceux des

» alliés qui montrent en ce moment la plus

» inquiétante hésitation, ces victoires, les républicains

» de France ne les ont obtenues qu’à

» force d’assignats et de réquisitions. La violence

» à l’égard des personnes et des propriétés était

» tout le secret de leur force. Mais de tels moyens

» ne peuvent durer. Il leur fallait pour appui

» les comités révolutionnaires, les représentans

» en mission et la guillotine! Or, tous ces appuis

» sont tombés sous la hache qui a frappé Robespierre.

» La France doit passer de l’accès de la

» fièvre chaude à l’abattement inévitable qui suit

» cette crise. Le système de la Terreur fera place

» au système opposé, et il n’y aurait rien d’étonnant

» qu’un retour à des sentimens plus humains

» amenât un retour à la royauté. — Quant

» à moi, la paix ne me paraîtra solide avec

» la France, que lorsque les Français seront

» rentrés dans la monarchie, ou du moins lorsque

» leur gouvernement aura éprouvé quelques

» changemens intermédiaires. Cependant, si

» nous refusons de traiter, ce n’est pas absolument

» parce que la France est constituée en république;

» mais parce que les principes de cette

» république mettent un obstacle insurmontable

» à toute espèce de négociation. Avez-vous fait

» attention aux discours de Tallien? Un tel gouvernement

» n’offre rien de stable; on ne peut

» se fier à de tels hommes, et déjà les plus hardis

» s’épouvantent de leur position!»

Une si vive attaque contre le comité de Salut Public ne pouvait rester sans réponse. La tribune des Tuileries doit une réplique à celle de Westminster, et l’Europe étonnée se voit ainsi reportée aux temps où les sénats de Rome et de Carthage discutaient d’un rivage à l’autre. Nous avons entendu M. Pitt; écoutons maintenant Boissy-d’Anglas.

Manuscrit de l'an trois (1794-1795)

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