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CHAPITRE I.

Table des matières

PREMIÈRE NÉGOCIATION DE BALE, ENTRE M. DE GOLTZ ET LE CITOYEN BARTHÉLEMY.

( Fin de pluviôse. )

LA Diète de l’Empire s’est décidée à voter le conclusum si impatiemment attendu en Allemagne. Après avoir déclaré que le but de cette guerre n’était pas de s’immiscer dans les affaires intérieures de la France, la Diète demande qu’on s’occupe de préparer les voies de la pacification. Mais le chef de l’Empire n’admet ce conclusum que sous la restriction d’une paix qui serait juste, honorable et acceptable, et provisoirement, il exploite, comme moyen de guerre, ce désir qu’on exprime pour la paix. Sous prétexte de mieux soutenir la négociation qu’on voudrait entamer, il recommande à ses co-états de fournir au plus tôt le quintuple contingent nécessaire pour ouvrir la campagne prochaine.

Cependant, depuis que le ministre plénipotentiaire de la Prusse, M. de Goltz, est arrivé à Bâle, divers envoyés des états d’Allemagne s’y sont rendus. L’aspect de cette ville a changé. Les curieux s’en approchent, et le célèbre M. Burke commence à y voir ce qu’il a appelé depuis le grand encan de l’Europe!

De son côté, le ministre plénipotentiaire de la République a reçu ses pouvoirs qui ont été signés le 26 nivôse (15 janvier). Quittant aussitôt la résidence qu’il avait dans la petite ville de Baden, il est allé s’établir à Bâle. A son arrivée, les magistrats et le grand tribun de l’état de Bâle lui ont fait visite, et de toutes parts on s’est empressé autour du pacifique envoyé de la terrible République.

Le citoyen Barthélemy est un homme d’une cinquantaine d’années, d’une haute stature, d’un extérieur simple qui se compose de modestie, d’aménité, de calme et de bonhomie. La bienveillance de son accueil inspire la confiance. Il soutient cette impression par une conversation facile qui décèle plus de pénétration que d’adresse, et plus de justesse que de brillant. Neveu du célèbre abbé Barthélemy, et protégé des Choiseul, il fait honneur à l’école qui l’a produit aux affaires.

Le 22 janvier, M. de Goltz et le citoyen Barthélemy ont échangé leurs pleins pouvoirs. L’entrevue a été très-gaie. Tel est le premier secret qui s’échappe de Bâle.

Deux jours après, le 24 janvier, ils sont entrés en conférence, et les propos sont devenus sérieux.

Les premières demandes de M. de Goltz ont été un armistice et la neutralité de Mayence, comme conditions préliminaires de la paix.

La Prusse a besoin de l’armistice, disait son ministre, pour amener les princes de l’Empire qui sont sous son influence, à prendre part à la paix avec la France.

Quant à Mayence, M. de Goltz ne dissimulait pas combien ce point était embarrassant. Les Français ont commencé le siége de cette place, et les Prussiens forment une partie principale de l’armée qui la défend. L’honneur du roi de Prusse ne serait-il pas compromis si ses troupes désertaient les remparts au moment où ils sont attaqués? La neutralité de Mayence pourrait seule tout concilier. D’un côté, les Prussiens et les Autrichiens l’évacueraient; de l’autre, les Français lèveraient le siège.

Mais l’Autriche consentira-t-elle à cette transaction? la Prusse se charge de le lui demander. Si l’Autriche s’y refuse, les Prussiens ne se retireront pas moins. Alors Mayence, réduite aux Autrichiens pour ses seuls défenseurs, ne peut tarder à capituler, et l’Allemagne ne pourra imputer cette perte qu’à l’obstination du Cabinet de Vienne.

Si, au contraire, l’Autriche se prête à l’expédient de la neutralité de Mayence, la place restera entre les mains des troupes des Cercles, qui la remettront à la France à la fin des conférences de Bâle, ou à la paix générale.

Ainsi, de manière ou d’autre, la Prusse ne dispute pas Mayence à la République.

Telles ont été les premières paroles de M. de Goltz; celles du citoyen Barthélemy sont un refus nettement prononcé.

Ce qu’on craint le plus du côté de la France, c’est qu on n’abuse de notre inexpérience des négociations par de vaines apparences, et qu’on n’ait d’autre dessein que de nous dérober un temps précieux, tout en faisant retomber l’odieux de la continuation de la guerre sur le comité de Salut Public.

«La France n’a pas d’intérêt à un armistice» ,

a répondu le citoyen Barthélemy; «elle n’en a

» qu’à la paix. Commençons par faire notre

» traité ; nous le tiendrons secret si vous le voulez,

» pour donner à l’Autriche le temps de

» s’expliquer, et à vos alliés du nord de l’Allemagne,

» celui d’arriver. Nous pourrons même,

» la paix signée, couvrir la cessation des hostilités

» sous le prétexte d’un armistice. Mais tant que

» la question principale n’aura pas été complétement

» résolue entre nous, mes instructions

» me défendent d’entendre à aucune trêve ni à aucune

» neutralité qui suspendrait les opérations

» militaires.»

M. de Goltz ayant allégué que ses instructions n’étaient pas moins impératives, on a jugé inutile de prolonger davantage cette discussion, et les deux négociateurs sont convenus d’en référer respectivement à leur Cabinet.

A peine ces deux difficultés venaient-elles de s’élever, que la négociation s’est trouvée tout-à-coup arrêtée par une cause encore plus grave. Le lendemain de la première conférence, M. de Goltz est tombé malade; la maladie n’a pas tardé à prendre le caractère le plus alarmant, et le dixième jour, M. de Goltz a succombé.

Manuscrit de l'an trois (1794-1795)

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