Читать книгу Les deux femmes de Mademoiselle - René Maizeroy - Страница 7
V
ОглавлениеChampdoré comprit et se frotta joyeusement les mains derrière l’imprudent qui lui prêtait si bénévolement la clef de son verger. Il avait en effet, un goût des plus prononcés pour les pommes du voisin et s’entendait merveilleusement à les cueillir.
Il usa de la permission, choisit son jour,–un de ces jours orageux où les femmes les plus farouches ont des «oui» plein les lèvres et semblent attendre quelque amoureux inconnu qui fera vibrer leur cœur et les grisera de baisers–et tout seul, en tête-à-tête avec la marquise de Folhohëc, dans un délicieux salon Louis XVI où les rideaux étaient tirés, où les fleurs avaient des odeurs enivrantes, où les meubles étaient bas et profonds comme des lits, il conta avec un art indicible la graveleuse histoire du club. Il la conta jusqu’aux dernières phrases et rapprochant sa chaise, en bon ami qui comprend son rôle, il ajouta la lamentable confidence du marquis.
Et comme une moue incrédule courait sur les lèvres de la jeune femme, il énuméra les mille cancans qu’on se répétait, entremêla de déclarations éperdues un boniment étincelant d’esprit où il était question du dôme des Invalides, des chevaux au rancart et des maris usés.
La marquise se tut longtemps. Ses narines tremblaient. Des frissons couraient dans tout son corps et un rire nerveux découvrait ses dents de jeune loup. A la fin, elle se leva d’un mouvement lassé, et regardant Champdoré dans les yeux avec un singulier regard, elle lui tendit la main.
–Au revoir et à bientôt, je le veux! J’adore les histoires, je les adore quand vous me les racontez, monsieur de Champdoré et quand mon malade n’est pas là!
Une semaine après, Tristan sautait au cou de son ami.
–Merci et remerci, lui disait-il avec une effusion enthousiaste. Ton histoire a produit des miracles, mon cher… Voilà cinq nuits que nous dormons tout le tour de cadran. Et, parbleu! si la sagesse continue, je vais bientôt avoir ma chambre.
–Je te le conseille, insista Champdoré très paternellement.