Читать книгу Mon voyage au pays des chimères - Antonin Rondelet - Страница 5
CHAPITRE PREMIER
JARRIVE A ÉGALICITÉ
ОглавлениеLe pays des Chimères se divise en deux parties principales: on y distingue la Haute et la Basse-Chimérique. La Haute-Chimérique a pour capitale Egalicité; la Basse-Chimérique, Organisation-Ville.
Nous avons commencé notre voyage par un assez long séjour à Egalicité.
Si j’étais un de ces conteurs impitoyables qui n’épargnent à leurs lecteurs aucun de leurs mouvements ni de leurs repas, j’aurais beau jeu de leur décrire ici les contrées que nous avons traversées avant d’arriver à la Haute-Chimérique.
Le chemin qui y conduit, passe par le pays des Rêves et des Illusions C’est assurément une des plus merveilleuses contrées du monde. Ceux qui y ont mis le pied, n’ont guère l’habitude d’en revenir. Il arrive le plus habituellement qu’ils s’y installent et qu’ils y passent le reste de leur vie, à moins qu’ils n’émigrent dans le pays des Chimères.
Le premier édifice qu’on rencontre en arrivant à Egalicité par la grande route des Illusions, est un vaste monument assez semblable à une caserne.Ce monument ne porte ni inscription ni emblème qui en puisse faire deviner la destination. Il fallait cependant que cet édifice jouât un rôle bien important dans la ville, puisqu’à l’heure même où nous passions devant la porte, une foule innombrable prenait place à son rang, de manière à former une immense queue, laquelle n’avait pas moins d’un demi-kilomètre de longueur, sur une hauteur de six personnes de front.
De Bornéo qui conduisait lui-même notre voiture, arrêta net les chevaux; puis, passant les rênes au domestique, il se hâta de mettre pied à terre et me fit signe de le suivre.
–«Qu’est-ce, qu’y a-t-il, mon cher Agénor? Où me conduisez-vous, et quelle est cette foule qui se presse avec tant d’impatience à la porte de ce palais?»
–«Défaites-vous donc, Francis,» reprit le comte avec quelque impatience, «de cette insup-portable habitude d’accabler les gens de vos questions. Interroger, mon cher ami, c’est assurément le meilleur moyen pour ne rien apprendre. Quel besoin avons-nous de faire savoir à tous ces gens-là que nous sommes étrangers, débarqués d’aujourd’hui même à Egalicité, et, par conséquent, réduits à croire sur parole tout ce qu’on voudra bien nous raconter?»
Je vois encore mon ami de Bornéo enfonçant vaillamment son chapeau sur sa tête, et prenant la file d’un air délibéré, comme s’il avait habité toute sa vie le pays de la Haute-Chimérique.