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XIV
LE LAISSER-PASSER DE LA PROVIDENCE

Table des matières

On déjeuna gaiement, non pas en face de l’auberge, en mangeant les minces provisions du bissac, mais dans la grande salle dont la cheminée flambait, à une table sur laquelle un poulet rôti répandait un parfum appétissant. M. Moniot voulait offrir cet adieu aux trois frères. Après le repas, il glissa trois écus de cinq francs dans la main de Robert.

–Ceci est bien à toi, lui dit-il; je ne suis pas très-riche, mais on aide volontiers à un brave enfant... Nous allons nous séparer ici... Embrasse-moi, retiens mon nom et mon adresse, et ne manque pas de me donner de tes nouvelles; car enfin, si l’homme à la ceinture de cuir ne se retrouvait pas...

Le maire embrassa les fils de Jeanne, et les recommanda du fond du cœur à cette mère universelle qui s’appelle la Providence. Elle veilla sans se lasser sur les trois petits exilés du village.

Non-seulement il ne leur arriva rien de fâcheux pendant leur long voyage, mais il semblait que tout le monde s’intéressait à leur situation, à leur infortune.

Grâce aux quinze francs de M. Moniot, ils purent coucher plus d’une fois dans l’écurie d’une auberge, et manger une plantureuse écuellée de soupe. Souvent, pour une faible somme, on les laissait monter dans une voiture allant d’une petite ville à une autre. Ils pesaient si peu! ils avaient l’air si honnêtes!

Du reste, quand il entrait avec ses frères dans une maison, Robert ne manquait jamais de montrer ses papiers.

–Nous sommes de petits voyageurs, disait-il, et non pas de petits vagabonds.,

Le certificat du maire leur portait bonheur; plus d’une mère citait leur exemple à ses fils.

La belle saison leur rendait le voyage agréable, et, grâce aux divers moyens de locomotion qu’ils employaient tour à tour, ils avançaient sans trop de fatigue.

De temps en temps, ils s’informaient de la route à suivre et du chemin qu’ils avaient à parcourir. Quand ils surent qu’ils se trouvaient à vingt lieues de Paris, il leur sembla que, dès le lendemain, ils coucheraient dans la grande ville.

Sans doute, ils ne s’en faisaient pas encore une idée, mais l’aspect des cités qu’ils traversaient leur donnait le pressentiment des choses magnifiques qu’ils allaient voir.

Ils cherchaient ensuite à se représenter quel homme était leur oncle, le frère de cette pauvre Jeanne qui s’en allait mourante, tandis que ses enfants s’acheminaientvers Paris.

Ils se promirent d’écrire à leur mère, dans la prochaine lettre que leur oncle enverrait pour eux, l’histoire désolante de Mulot, celle de Brisque et de Martin, l’épisode de la ceinture de cuir, et de parler de l’hospitaltié de M. Moniot, le maire des Ajoncs.

–Ce sera certainement bien bon à mon oncle Magloire de coucher sur le papier tout ce que nous lui raconterons, dit Robert; mais c’est égal! dès que je le pourrai, j’apprendrai à écrire, afin de dire moi-même à ma mère ce que j’aurai dans le cœur et ce qui surviendra dans ma vie. Avant trois mois je veux moi-même lui envoyer mes baisers par la poste.

–Moi aussi, dit Cri-cri.

La route s’avançait; les enfants se trouvaient à Rueil, quand un gendarme leur demanda où ils allaient. Robert ôta poliment son chapeau, étala le certificat du maire des Ajoncs et attendit tranquillement.

Le brave soldat, qui portait à la boutonnière la croix de la Légion d’honneur, regarda Robert et ses frères avec attendrissement, puis il porta la main à son chapeau.

–Allons! dit-il, on peut bien présenter les armes aux braves gens! Garde ton laisser-passer, mon petit; je ne souhaite qu’une chose, c’est que mes quatre fils te ressemblent!

Les robinsons de Paris

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