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XVIII
UN AMI

Table des matières

Robert se pencha vers celui qui venait de lui adresser la parole, et, le regardant à la lueur des becs de gaz qui projetaient leur lumière sur son front, il vit un adolescent robuste dont la physionomie respirait l’honnêteté. L’œil était bien ouvert, la bouche souriante, l’accent affectueux et encourageant. Il portait une blouse blanche très-propre, et ses cheveux peignés avec soin débordaient d’une casquette crânement posée sur l’oreille.

Il inspira tout de suite confiance à Robert.

–Je vous remercie, lui dit-il, nous venons d’éprouver une dure déception... Notre mère nous avait envoyés à Paris pour demeurer chez notre oncle... Nous avons appris qu’il a vendu son fonds d’épicerie depuis six mois, et qu’en ce moment il est en train de faire le tour du monde.. Nous voilà dans ce Paris cent fois plus vaste que la forêt de chez nous, émerveillés, mais épeurés aussi, je vous l’assure.

–Ainsi, demanda le jeune garçon, vous ne connaissez personne?

–Personne! répondirent les trois enfants d’une voix dont chaque note donnait une modulation douloureuse;

–Diable! répliqua le jeune garçon, c’est grave! Et où comptez-vous coucher?

–Nous ferons comme d’ordinaire depuis notre départ du village, repartit Robert; quand aucune porte ne s’ouvrait devant nous, nous dormions dans les champs, et je vous affirme que nous nous y trouvions bien tous trois, sans compter Bijou.

–Qui çà, Bijou?

Jean présenta le beau pigeon ensommeillé.

Le jeune garçon caressa l’oiseau avec une préoccupation évidente. Il se tourmentait de la situation de ces enfants, qu’il était tenté de traiter en frères. Sa bonté naturelle lui conseillait de ne point les abandonner. Leurs naïves réponses le touchaient. Il comprenait ce que devait souffrir Robert, moins pour lui encore que pour Jean et Cri-cri, et s’adressant à l’aîné des trois orphelins:

–C’est que, dit-il, à Paris on ne permet à personne de coucher à la Belle-Étoile. chacun doit avoir son gîte. Bien des malheureux vont, je le sais, chercher un refuge sous les arches des ponts, dans les bateaux de charbon amarrés aux quais de la Seine; mais il n’est pas rare que la police y fasse des recherches, et comme la plupart des enfants sans domicile sont affiliés à des bandes de filous, on les enferme provisoirement au violon, et si le lendemain ils ne sont par réclamés par leur famille, on les traite en vagabonds et on les place dans une maison de correction, c’st-à-dire qu’ils restent prisonniers jusqu’à leur majorité.

–Prisonniers! s’écria Robert.

–Il faut bien les empêcher de mal faire, ce qui ne manquerait pas d’arriver s’ils étaient sans asile et sans ressources... La faim est une mauvaise conseillère, elle entraîne facilement au vol.

–Oh! pour cela, fit Robert en relevant le front, nous sommes des enfants honnêtes, et j’ai là le certificat du maire des Ajoncs constatant que nous avons reporté chez lui une ceinture de cuir renfermant cinq cents pièces d’or.

–Alors ce qui vous adviendrait de mieux serait d’être reconduits dans votre village de brigade en brigade.

–Comme des voleurs, par les gendarmes!

–Ne vous y trompez pas, mes chers petits, tout cela est juste et paternel. Il faut que l’autorité garde les enfants dans sa main. Ils sont faibles, sans défiance, il est facile de les attirer, de les tromper.

–Mais, dit Cri-cri, je ne veux pas aller en prison, moi!

–Il ne nous reste pas un sou... ajouta Jean.

–Si nous vendions nos vestes? reprit Robert.

–Les boutiques de fripiers sont fermées, dit le jeune garçon; faisons mieux, vous avez l’air de bons enfants; je me souviens d’avoir été pauvre, soutenant ma mère malade avec mon salaire d’apprenti,.. L’Evangile veut que l’on s’aide, et mon cœur me pousse à vous protéger... Voulez-vous venir chez moi?

–Chez vous! s’écria Robert; vous consentiriez à nous loger cette nuit?

–La chambre n’est pas élégante, mais elle vaut toujours mieux que votre hôtellerie de la Belle-Étoile... Une fois rentrés, vous me conterez votre histoireplus au long... et nous aviserons à ce que nous devons faire.

–Oh! vous êtes bon! dit Robert.

–Je remplis mon devoir... Si plus tard vous devenez heureux, vous accueillerez à votre tour les enfants abandonnés, errants, en souvenir de votre première soirée dans les rues de Paris... Donnez-moi la main, Cri-cri, et marchons vite; il se fait tard, je dois demain me lever de bonne heure... heureusemeut la rue Saint-Jacques est tout près.

Les quatre enfants ne tardèrent pas à y arriver, et gagnèrent une maison d’aspect assez triste, dont leur guide poussa la porte à claire-voie.

Les robinsons de Paris

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