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XV
ARRIVÉE A PARIS

Table des matières

Entin, les voilà dans Paris!

Leurs sabots se sont usés sur toutes les routes, le bissac est vide; il leur reste une toute petite pièce de dix sous.

Mais ils ne s’affligent ni ne s’inquiètent, ils sont arrivés.

Ils ont su gagner Paris, eux si jeunes; il ne leur sera pas difficile de trouver la maison de leur oncle.

Cependant les rues semblent s’allonger comme des rubans fantastiques; elles se croisent, se mêlent, se confondent. Leur hauteur, leur nombre, les lumières du gaz, la foule qui se presse dans des directions opposées, tout les surprend, les étonne, les confond.

Ils s’informent de la rue des Moineaux, on la leur indique; mais ils se trompent ou ils oublient.

Tout est si nouveau pour les orphelins dans cette ville immense qu’ils restent stupéfaits, interdits.

Pour la première fois ils se sentent perdus au milieu d’une masse d’hommes, au sein de laquelle ils ne connaissent pas un être.

Ils se tiennent tous trois pas la main, dans la crainte de; s’égarer, ils marchent, marchent encore.

Tout à coup un courant de foule les sépare; Cri-cri se trouve seul, la terreur le prend, il court, tombe, et n’entend pas une voiture venant à grand train.

Jean appelle Cri-cri d’une voix désolée; Robert s’élance en avant et voit son frère renversé.

Sans calculer le danger, il se précipite sous les pieds des chevaux, en poussant un cri d’angoisse; puis il enlève son frère dans ses bras.

Cri-cri est évanoui; un rassemblement se forme; le cocher, désespéré de ce qui vient d’arriver, fait monter dans son fiacre les deux enfants valides, étend Cri-cri sur la banquette du fond, puis cherche du regard la boutique d’un pharmacien.

Des bocaux verts et rouges en signalent une dans le voisinage. Le cocher arrête les chevaux, les enfants descendent, etun moment après, grâce à des soins intelligents, Cri-cri rouvre les yeux.

–Rien de cassé? demanda le cocher.

–Rien du tout! répondit le pharmacien.

–Vous n’êtes pas de Paris, mes petits agneaux? demanda le cocher.

–Non, monsieur, répond Robert, nous venons y trouver notre oncle.

–Et où demeure-t-il, votre oncle?

–Rue des Moineaux, 17.

–Eh bien! reprend le cocher, quoiqu’il n’y ait pas de ma faute dans’ l’accident, je ne vous laisserai pas sur le pavé... Ça ne me retardera pas beaucoup de vous mener rue des Moineaux. Acceptez-vous une voiture?

–Avec grande reconnaissance, répondit Robert.

Une seconde après, les trois enfants s’y trouvaient installés.

Il ne s’agissait pas cette fois d’une charrette à montants de bois, d’une carriole garnie de paille, mais d’une voiture assez bien suspendue, doublée de satin, et qui avait connu de meilleurs jours.

Les trois frères, le visage collé aux vitres des portières, regardaient en ouvrant de grands yeux, s’étonnant, admirant, se réjouissant de la vive allure du cheval, qui semblait vouloir à sa manière prendre sa part d’une bonne action.

Robert s’émerveillait de la largeur des places, du nombre des voies coupées dans tous les sens par les voitures, de la foule houleuse se pressant sur les trottoirs, des cris des cochers, des chansons des gens trop gais, des appels des gamins, des cris des petits marchands..

Enfin la voiture s’arrêta; le gros cocher descendit de son siège, et ouvrit en riant la portière:

–Vous êtes arrivés, mes petits bourgeois!

Les enfants descendirent; le cocher tira le cordon, et, tandis que les fils de Jeanne attendaient qu’on leur vînt ouvrir, le brave Nicolas caressa les flancs de sa bête d’une mèche de fouet effiloquée, et Cocotte partit de sa plus belle allure, laissant les enfants à la porte du numéro17 de la rue des Moineaux.

Les robinsons de Paris

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